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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 13.djvu/905

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la fécule, et ces élémens ont acquis par la macération des propriétés nouvelles : ils sont devenus plus appétissans, plus digestifs et d’une assimilation plus facile ; ils se transforment plus aisément en chair musculaire, en lait et en graisse. » Si ces observations sont justes, et tout engage à croire qu’elles le sont, au moins dans ce qu’elles ont de plus général, la distillation des grains, et par suite l’application des résidus à la nourriture du bétail, ne peuvent que prendre une sérieuse importance qui aidera à soutenir les cours des céréales, en même temps qu’elle favorisera la production de la viande et de l’engrais.

On pouvait craindre qu’en présence de la baisse, les anciens préjugés contre la libre importation des denrées alimentaires ne se réveillassent, et que les producteurs ne se crussent intéressés à s’abriter de nouveau sous la protection apparente de l’échelle mobile. Ce retour de l’opinion eût été d’autant plus excusable que la baisse a été due en partie à son origine à un surcroît d’importation ; le commerce était lancé à fond de train dans cette voie et n’a pas pu s’arrêter à temps. Malgré cette circonstance fâcheuse, aucune voix ne s’est élevée dans ce sens. On a été unanime pour réclamer la liberté d’exportation et de distillation ; personne n’a protesté contre la liberté d’importation. Ce fait, des plus remarquables, semble indiquer que les agriculteurs français commencent à avoir le sentiment de leurs véritables intérêts, et qu’ils ne cherchent plus dans des combinaisons de douane ce qui ne saurait s’y trouver. Un seul point a fait exception ; les producteurs d’alcool ont réclamé contre la réduction du droit sur les alcools étrangers, et le gouvernement a accueilli leur demande. Le droit était primitivement de 50 francs par hectolitre, il avait été réduit à 15, il a été reporté à 25. La question de principe est ici hors de cause ; ce n’est pas un droit de 10 francs de plus ou de moins qui changera beaucoup les conditions du marché. La vraie règle à suivre, c’est la considération fiscale, et le meilleur droit celui qui rapporte le plus au trésor.

Tout annonce donc que nous marchons décidément, au moins pour les denrées alimentaires de première nécessité, vers un régime de liberté constante, bien supérieur à ce régime incertain où l’administration, ouvrant et fermant les portes à son gré, ajoutait à la mobilité naturelle des prix sa propre mobilité. Le plus fort est fait maintenant, puisque nous avons déjà traversé six grands mois de baisse excessive. Au point où la baisse est parvenue, il est bien évident que les grains étrangers n’y sont pour rien, puisque le blé est au dehors, en Algérie par exemple, aussi cher qu’en France sur la plupart des marchés. Cette baisse tient à deux causes principales : premièrement l’extension inusitée donnée aux emblavures et le soin extraordinaire apporté à la culture du blé pendant la disette, ce