Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 14.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
21
ÉTUDES D’HISTOIRE PRIMITIVE.

pas trop considérables ; mais vient-il à périr, alors le monde nouveau qui s’est formé diffère notablement du monde ancien qui lui avait donné naissance, et ce qu’il produit n’est plus identique à ce qui fut produit jadis. Les espèces sont dans le même cas : elles peuvent traverser et ont traversé, en effet, le défilé qui enchaîne l’un à l’autre deux renouvellemens ; mais celles qui ne se sauvent pas ne reparaissent plus. D’autres, du même genre, prennent leur place. Ainsi dans le genre des éléphans, qui est venu de l’étage diluvien à notre étage, les espèces diluviennes ont été anéanties ; le genre éléphant, quand il s’est renouvelé, a eu l’éléphant des Indes et l’éléphant d’Afrique, qui ne sont pas fossiles, et il n’a plus eu le mammouth, qui est demeuré enseveli. Les genres, les espèces, une fois morts, ne ressuscitent pas.

On sait qu’une prodigieuse chaleur anima le globe terrestre, tellement qu’il a été en fusion, et que les parties centrales en sont encore incandescentes. On sait aussi qu’à la surface cette chaleur centrale est tout à fait insensible, et que la température n’y dépend plus que des rayons solaires et de la densité de l’atmosphère. Les physiciens n’ont pas résolu la question de savoir si, dans les époques anciennes, et quand la croûte terrestre commença d’être disposée à porter des végétaux et des animaux, il en était comme aujourd’hui, et si la température intérieure ne comptait que pour une fraction indifférente dans la température superficielle. Toujours est-il que la paléontologie indique de son côté que les époques anciennes ont été généralement plus chaudes que la nôtre. Pourtant il ne faudrait pas considérer cet accroissement comme régulier et continu ; il y a eu une période de froid qui a sévi du moins dans certaines parties du globe. C’est l’époque dite glaciaire, dont l’existence, difficile à expliquer, est attestée par les immenses glaciers et leurs vastes moraines, aujourd’hui vides d’eaux et de glaces. Mais cette anomalie laisse subsister le fait principal : la température fut plus élevée. Le mammouth, qui peuplait la Sibérie, tout velu qu’il était, n’y vivrait pas présentement, attendu que cette contrée est devenue trop froide pour produire les végétaux nécessaires à la nourriture de ce puissant animal, et l’Europe entière a été, pendant l’époque houillère, couverte d’une riche et grande végétation qui ne peut être comparée qu’à celle de quelques pays intertropicaux. Cette élévation de la température dans les régions qui sont maintenant sous un autre climat mettait beaucoup plus d’uniformité sur la surface de la terre ; cette uniformité se faisait sentir sur les productions tant végétales qu’animales, et c’est ce que la paléontologie constate de tous côtés, de sorte que la diversité des formes de la vie a crû en même temps que croissait la diversité des circonstances climatologiques. De quelque côté que l’on porte le regard dans ce long flux des âges,