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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 14.djvu/563

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ZOBEÏDEH
SCENE DE LA VIE TURQUE




C’est à la société musulmane que s’adresse principalement ce récit : l’Europe chrétienne pourra y recueillir sans doute sur la vie de l’Orient plus d’une indication de nature à l’intéresser ; mais la leçon morale qu’on peut dégager de cette histoire, dont le fond n’est que trop vrai, comment l’appliquerait-on en dehors du milieu étrange où la femme musulmane est condamnée à vivre ? Si j’avais à résumer d’avance les impressions que m’a laissées ce drame, dont j’ai connu les principaux acteurs, je dirais aux chefs de famille musulmans : — Prenez garde, il y a malheureusement dans tous les pays des caractères portés au crime comme celui de la Circassienne Zobeïdeh ; mais ces caractères se développent plus ou moins librement, suivant les conditions spéciales où ils se trouvent placés. Parmi ces jeunes filles nées dans les montagnes du Caucase, que leurs parens n’élèvent que pour s’enrichir en les livrant à quelque musulman prodigue, combien en est-il qui sauront se dépouiller, une fois parvenues au rang d’épouses et de mères de famille, des passions de l’esclave et de la concubine ! Vous êtes-vous jamais demandé quelles haines, quelles rivalités farouches se cachaient derrière ces physionomies qui, pour vous accueillir, se couvrent si vite de masques gracieux et sourians ? Savez-vous surtout ce qu’ont à souffrir loin de vos regards les enfans de tant de mères que séparent d’implacables jalousies ? Me direz-vous si la mortalité qui règne parmi ces jeunes victimes n’a pas souvent pour explication naturelle les