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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 14.djvu/633

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volontaire que les Milanais accordèrent[1] à leur nouveau duc et 11,000 ducats que lui transmit le cardinal de Médicis, on recruta deux bandes de quatre mille et de six mille lansquenets, la première sous François de Castelalt, la seconde sous le fameux George Frondsberg. En attendant l’arrivée de ce puissant renfort, Prospero Colonna, placé derrière les murailles des villes, se tint sur une forte défensive. Il espéra que l’armée française, faute de pouvoir vaincre, et à la longue de pouvoir être payée, serait exposée à se fondre et finirait par se disperser.

Cette armée était très considérable, et il était plus difficile de la tenir longtemps sur pied que de la conduire à la victoire, si l’ennemi acceptait la bataille. Lautrec entra en campagne aussitôt que les Français se furent réunis aux Vénitiens et aux Suisses, et qu’il eut recueilli les trois mille hommes des bandes noires qui avaient servi, jusque-là dans l’armée de la ligue et qui venaient de passer, avec leur chef Jean de Médicis, à la solde de François Ier. Il marcha droit sur Milan, comme pour l’assiéger et le prendre. Arrivé devant ses murailles, il tenta de se mettre en communication avec la garnison qu’il avait laissée dans la citadelle ; mais il n’y parvint point. Quelques attaques qu’il essaya contre la ville ne furent pas plus heureuses. Le blocus étroit de la citadelle, la défense vigilante de la ville par une garnison qui était une véritable armée, les dispositions belliqueuses des habitans qui s’étaient formés en compagnies militaires[2] et que les prédications éloquentes d’un moine augustin excitaient à combattre avec les impériaux, s’ils voulaient assurer le gouvernement de leur duc national, convainquirent bientôt Lautrec de l’impossibilité de forcer Milan.

Après avoir passé plusieurs jours devant cette grande ville et y avoir perdu du monde, il renonça au dessein de s’en emparer. Il alla se placer à Cassino, entre Milan et Pavie, afin d’empêcher les six mille lansquenets qu’amenait Francesco Sforza de se réunir à Prospero Colonna. Il resta plusieurs semaines dans cette position. Il parvint bien à tenir les impériaux séparés, mais c’était là un avantage purement négatif, et il laissa s’écouler un temps précieux sans faire aucun progrès. Bientôt même l’approche de son frère le maréchal

  1. Cronaca Grumello, citée dans Verri, Storia di Milano, t. II, cap. XXIII, p. 186. — « Reliquum vero è tributis Mediolanensium conferebatur. » Gal. Capella, ibid., fol. 1266.
  2. « A Milano… fu messo un ordene, che ogni parochia facesse el suo capitaneo et la sua bandera, con li soi caporali, con quello ordine quanto se si avesse de andar alla battaglia… talmente che la città se rallegrava tutta vedendo che tutti erano d’un animo a mettere la vita e la robba per defensione della patria et contra Franzesi. » Cronaca di Milano scritta da G. M. Buriggozo merciajo dell’anno 1500 sine al 1544 dans Archivio storico Italiano, etc… Firenze 1842, in-8o, t. III, p. 435, 436.