Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 14.djvu/734

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars 1858.

Nous assistons depuis quelque temps en vérité à un spectacle aussi étrange qu’instructif. À la surface de la politique, on voit tous les signes d’un trouble indéfinissable. Les rapports embarrassés des gouvernemens, les discussions de la tribune et de la presse, les mesures adoptées ou proposées en divers pays, les variations subites de l’opinion, sont autant d’indices curieusement interrogés, et les imaginations ardentes, ayant quelque peine à comprendre que les faits ne peuvent toujours se mettre au pas de leurs conjectures, voient aussitôt surgir tout un ordre nouveau d’événemens. Ces imaginations hardies embrassent l’Europe dans leurs conceptions ; elles brisent ou recomposent les alliances, elles proclament des incompatibilités de situations et forment des combinaisons nouvelles, elles établissent des camps opposés et mettent déjà des armées en mouvement, si bien qu’on finit par se demander où est le secret d’une situation si subitement et si profondément troublée. Des incidens nouveaux sont-ils venus compliquer la politique générale ? Des événemens imprévus ont-ils éclaté tout à coup sur l’Europe ? Les gouvernemens eux-mêmes marchent-ils dans la voie où on les suppose engagés, et montrent-ils quelque disposition à laisser des malentendus trop prolongés dégénérer en rupture ? Rien de tout cela n’existe, à ce qu’il semble. Plus que jamais, au contraire, les gouvernemens protestent de leurs intentions conciliantes et pacifiques. D’un autre côté, les questions d’un ordre général qui peuvent devenir l’objet de sérieux débats entre les cabinets sommeillent pour le moment. Il serait même difficile de préciser l’époque où pourra définitivement se réunir la conférence qui doit résoudre toutes les difficultés pratiques inhérentes à l’exécution du traité de Paris. Les délégués des puissances à Bucharest en sont encore à préparer leur rapport sur les principautés danubiennes, et on conçoit qu’un document où il s’agit de concilier des avis fort divers ne peut être rédigé à la légère. Les troubles qui