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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 14.djvu/871

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frottés avec de l’écorce de bouleau et du sable sec, ce qui les faisait reluire : tout indiquait dans ce ménage l’abondance et le bien-être. Les villages ne dépassent point une certaine zone de la région montagneuse ; au-delà, on ne rencontre que des Kalmouks, dont la chasse est le métier, qui, l’été, conduisent leurs troupeaux paître sur les cimes des montagnes, et les ramènent en automne dans les vallées, où ils passent l’hiver.

Après avoir exploré le versant nord de l’Altaï, M. Atkinson voulut connaître le versant sud, et fut tout surpris de ne plus trouver que de maigres arbrisseaux au lieu des forêts de cèdres dans lesquelles il avait erré. Le versant méridional de l’Altaï est entièrement dépouillé d’arbres, ce que l’on explique par l’action dévorante et la violence des courans atmosphériques qui, avant d’arriver à cette région, ont passé sur le steppe et les nombreux lacs salés qui y entretiennent la désolation. M. Atkinson traversa l’Altaï par les passes de Khalsoun, au milieu de paysages dont il ne peut rendre l’aspect grandiose et l’infinie variété. Du sommet du Khalsoun, le voyageur put contempler en face de lui la masse énorme du Biélouka, qu’il devait gravir quelques années plus tard : ce géant de l’Altaï élevait jusqu’aux nues ses deux pics couverts de neiges éternelles et ses glaciers immenses ; il dépassait de beaucoup tout le reste de la chaîne, quoique un grand nombre des pics qui l’entouraient portassent également une couronne de neige. Au-dessous de ceux-ci s’étendait à perte de vue, comme une mer de montagnes, tout le versant méridional de l’Altaï, dont les derniers chaînons auraient pu être pris pour une vapeur légère à l’extrémité de l’horizon, si quelques aiguilles, resplendissant aux feux du soleil, ne s’étaient clairement détachées.

En descendant ce côté de l’Altaï, M. Atkinson arriva aux mines d’argent de Zirianovsky, situées à quelques verstes seulement de la Mongolie chinoise et du steppe des Kirghiz. Ce sont les mines les plus importantes et les plus productives de l’Altaï : le minerai y est d’une richesse extrême ; les filons qui rendent le plus se trouvent à trois cents pieds au-dessous du sol ; il en est même que l’on poursuit jusqu’à une profondeur de cinq cents pieds. Le principal obstacle que rencontrent les mineurs est la quantité d’eau qui les inonde sans cesse, et qu’ils expulsent avec des pompes grossièrement construites. Le minerai n’est point travaillé à Zirianovsky : deux mille chevaux sont employés toute l’année à le transporter dans de petites charrettes à cent verstes plus loin, au pristan de Verchnayan, où il est embarqué sur l’Irtisch, qu’il descend jusqu’à Oust-Kamenogorsk. Là il est débarqué et chargé de nouveau sur des voitures qui le conduisent à Barnaoul, à une distance de six cents verstes. Ces transports multipliés, qui paraissent accroître inutilement les frais, ont pour cause un fait physique dont la science donnera peut-être un jour