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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 17.djvu/129

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cence ; mais, comme je l’ai dit, plusieurs de ces mesures vont précisément contre le but, et, par une inconséquence qui ne semble avoir d’autres causes que des nécessités pécuniaires, tout ce que ces établissemens ont pu inculquer de bons principes aux convicts vient se perdre dans la mesure générale qui, après leur temps de captivité cellulaire ou silencieuse, les rapproche les uns des autres dans les chantiers de Portland, de Portsmouth et de Dartmouth. Cette dernière période de leur détention, en les livrant à une contagion continuelle et à peu près sans obstacles, les rejette presque tous dans leur première corruption. Ceux même qui sont transportés en sortant de leur cellule se dépravent de nouveau pendant une traversée de long cours, de sorte que, malgré toutes les améliorations du régime pénitentiaire depuis 1843, les condamnés n’ont pas apporté de meilleures dispositions morales aux lieux de transportation. Tant que les diverses possessions anglaises qui les recevaient depuis le règne de Jacques Ier, avaient eu un besoin urgent de leurs bras, elles s’étaient résignées aux terribles inconvéniens de leur contact; mais le moment devait venir où, le travail des convicts cessant d’être nécessaire, leur présence ne pouvait plus être qu’un fléau sans compensation. Dès lors, sous l’impression de la terreur répandue par le pillage et le meurtre, les colonies réclamèrent contre une servitude désastreuse qu’en bonne justice on ne pouvait leur imposer; elles la rejetèrent même par une déclaration péremptoire, et en 1853 il n’y avait plus que l’Australie septentrionale qui consentît encore à ouvrir ses ports à cette immigration dangereuse.

Dans cette situation, il fallut, sinon abolir la transportation, du moins y suppléer en grande partie par une autre peine, la servitude pénale, qui diminua la durée de la captivité, mais qui ne laissa plus au convict la faculté de l’abréger par sa bonne conduite. En même temps, les prisons de la métropole ne pouvant plus contenir tout ce que les cours criminelles leur envoyaient, on fut obligé d’accorder des tickets of leave à un grand nombre de condamnés à la transportation, et rien moins que préparés à l’usage de la liberté. Il en résulta que l’Angleterre, outre tous les crimes dont elle était déjà infestée, devint encore le théâtre de tous ceux qui se commettaient précédemment aux colonies. Des hommes enfermés pour offense à la société lui furent rendus malgré la conviction où l’on était qu’ils renouvelleraient leurs outrages contre elle. Ces élargissemens intempestifs se multiplièrent d’autant plus que la réaction contre les lois de sang dont nous avons parlé était plus complète. En effet, par l’acte de 1853, qui institue la servitude pénale, le vol, quelle que soit la valeur de l’objet volé, ne peut être puni de plus de deux années de travaux forcés, et le voleur récidiviste, quel que soit le