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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 17.djvu/534

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confine dans les occupations du commerce ou dans les fonctions publiques le petit nombre d’Européens qu’une destinée peu enviée conduit sur les bords du Sénégal. S’ils inclinent volontiers à l’horticulture pour leur agrément ou leur profit, tout les détourne de la grande culture en pleine campagne : l’isolement, la chance des maladies, le défaut de sécurité. Le Sénégal est donc une colonie essentiellement commerciale, procurant à la métropole certaines matières premières qui lui manquent, et lui fournissant un débouché pour quelques denrées alimentaires et un grand nombre de produits fabriqués : système d’échanges également favorable à la prospérité des deux pays, et qui réalise l’harmonie désirable des climats, des terres et des races à un plus haut degré que la prétention, poursuivie quelquefois à outrance et sans égard aux lois de la nature, d’implanter partout les populations, les cultures et les méthodes européennes.

Les années 1852 et 1853 s’écoulèrent dans l’attente d’une solution de la part de la métropole. On dut se borner à écarter les obstacles que les gens du Fouta opposaient au commerce dans le pays de Galam ; quelques arrangemens amiables furent conclus avec les chefs. Les embarcations expédiées de Saint-Louis à Bakel acquittèrent le droit de passage suivant le tarif établi en 1849 après la suppression de la compagnie de Galam, tarif que le Fouta avait alors refusé d’accepter, parce qu’il substituait un droit fixe par navire à un droit proportionnel par tonnage. L’arriéré des coutumes depuis 1839 fut également réglé. Dans ces négociations, le pays se montra en proie à l’anarchie, divisé entre plusieurs chefs qui méconnaissaient l’autorité plus nominale que réelle de l’almami, en outre excité par le fanatisme musulman, qui fait dans l’Afrique occidentale une active propagande. Néanmoins les relations, bien que toujours délicates et difficiles, se maintinrent, et permirent de poursuivre le plan qui, proposé par la colonie, avait conquis l’adhésion du gouvernement métropolitain, et dont une nouvelle pétition réclama l’exécution dans le courant de 1854. C’est M. le capitaine de vaisseau Protêt, alors gouverneur du Sénégal, aujourd’hui commandant de la station navale des côtes occidentales d’Afrique, qui eut l’honneur d’inaugurer, dès le printemps de cette année, une politique nouvelle.


II. PREMIERE EXPEDITION. — PRISE DE POSSESSION DU OUALO. — CAMPAGNE DE 1855. — UN PROPHETE MUSULMAN.

Le rétablissement du fort de Podor, à soixante-cinq lieues de Saint-Louis, fut l’objet de la première campagne. Ce fort avait été construit dans le siècle dernier par une des compagnies du Sénégal,