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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 17.djvu/546

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Ces succès avaient encore moins de valeur par eux-mêmes que parce qu’ils donnaient au noir le sentiment de nos forces et des siennes, en lui montrant le Maure fuyant devant ses ennemis de toute la vitesse de ses chevaux. Traqués de tous côtés comme des bêtes fauves, les Trarzas se rapprochèrent des Braknas dans l’espoir de trouver asile auprès d’eux, et Mohammed-el-Habib parvint en effet à maintenir dans son alliance Mohammed-Sidi. À ce dernier nous opposions toujours Sidi-Eli, qui, à Bakel et à Podor, avait été salué de sept coups de canon comme roi des Braknas. Une proclamation affichée à Podor lui confirmait officiellement ce titre. Le théâtre de la guerre se trouva dès lors, au mois d’avril, rapproché de ce dernier poste, qui fut appuyé par un camp créé à Koundi, dans l’intérieur, et par des attaques incessantes contre tous les ennemis que l’on put atteindre. Au mois de mai, les Trarzas, démoralisés par leurs pertes, rentrèrent dans leur pays, où le gouverneur les poursuivit de nouveau. Dans une de ses excursions, il combina la marche de la colonne à terre avec celle des bateaux à vapeur sur le fleuve, et reconnut combien on pouvait ainsi mobiliser les troupes et multiplier leurs forces par leur vitesse. Les comptoirs de Podor, délivrés de toute inquiétude, virent affluer les gommes ; les traitans de Saint-Louis s’y rendirent en nombre sur leurs bateaux. Les négocians, pleins de confiance, fondèrent des établissemens fixes, et l’on vit de belles maisons en pierre succéder aux cases de paille.

Le contre-coup de ces succès retentit, comme toujours, dans le Fouta. Un députe arriva à Podor, porteur d’une lettre de l’almami et des principaux chefs, dans laquelle ils renouvelaient leurs protestations d’amitié et leur vif désir d’obtenir une paix définitive. Ils renonçaient à toute coutume, à tout droit de passage, promettant de respecter les gens du Sénégal qui viendraient trafiquer dans leur pays, de favoriser leur commerce, de nous livrer tout individu qui se rendrait coupable d’hostilité envers nous. Sur ces promesses, la paix fut accordée au Fouta.

Ces événemens parurent assez favorables pour proclamer avec plus de solennité que l’année précédente l’annexion et l’organisation nouvelle du Oualo. Le 2 juin 1856, à. Richard-Toll, sous l’œil et par l’ordre du gouverneur, les chefs de cercle furent reconnus officiellement en présence des députations de tous les villages et de la garnison du poste sous les armes. M. Faidherbe prononça une allocution dans laquelle il annonçait que l’empereur des Français, voulant que le Oualo fût désormais plus fort que les Maures et à l’abri de leurs attaques, s’était déclaré seul maître et brak de leur pays, et avait décidé que des chefs, nommés en son nom par l’autorité locale, en commanderaient les différentes parties.