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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 17.djvu/907

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les rigueurs du système ? Qu’est-ce que le régime des zones pour les houilles, sinon une des formes de la protection ? On ne détruit pas le principe, parce que sur tel point de la frontière les houilles de l’étranger sont moins fortement taxées que sur un autre point. Ce que l’on réclame pour l’ensemble du tarif algérien n’est que l’emploi d’un procédé protectioniste. De même que l’intérêt de nos départemens de l’est et du midi a engagé le législateur à faciliter, au moyen de droits réduits, l’achat des houilles prussiennes ou anglaises, de même l’intérêt de la colonisation, un intérêt de premier ordre, lui prescrit aujourd’hui d’assurer, par des taxes spéciales, l’approvisionnement aisé et peu coûteux des marchés algériens. Quant à l’objection tirée de ce que, si le tarif général n’était pas appliqué aux frontières de l’Algérie, les produits étrangers pourraient, après une simple escale dans un port de la colonie, pénétrer frauduleusement en France sans acquitter de droits de douane, elle a déjà été réfutée lors de la discussion de la loi de 1851. Notre service des douanes est trop intelligent pour ne point déjouer l’abus que l’on redoute ; en outre, la nécessité de débarquer les marchandises étrangères dans un port algérien, de les entreposer dans des magasins où elles prendraient en quelque sorte le cachet de la naturalisation, de les embarquer de nouveau pour les diriger vers un port de France, toutes ces manœuvres, tous ces embarras entraîneraient des frais qui seraient assez élevés pour décourager la contrebande, et qui, dans la plupart des cas, équivaudraient au montant des droits que le commerce de mauvaise foi aurait voulu éluder.

La question des tarifs algériens a été récemment examinée au sein d’une société qui, sous le nom de Société centrale de colonisation, a entrepris d’exposer les besoins et de discuter les intérêts des colonies françaises. Composée de colons, de publicistes, de fonctionnaires qui ont habité ou habitent encore l’Algérie, cette société libre, dont on ne saurait trop encourager les utiles travaux, a consacré une partie de sa première session à l’étude du tarif. L’opinion qui vient d’être développée y a été soutenue avec autorité par un publiciste distingué, M. Jules Duval, et par un habite colon, M. Dupré de Saint-Maur. L’un et l’autre ont demandé le maintien de la loi de 1851, complétée par une clause générale portant que tous les produits de l’Algérie, naturels ou manufacturés, seront admis en franchise dans les ports français. « Pour satisfaire les intérêts réels de la colonisation, a dit M. Dupré de Saint-Maur, il n’est besoin ni d’introduire en Algérie le libre échange, qui rompt en visière à toutes les pratiques commerciales de la mère-patrie, ni d’y importer toutes les complications d’un vieux système douanier. Le régime actuel, modifié en ce sens que la libre admission serait désormais la règle générale, sauf à statuer ultérieurement sur les exceptions jugées nécessaires, assurerait le succès de l’œuvre ; il offrirait de plus l’avantage de permettre une application facile, immédiate, et de ne point briser, de resserrer au contraire les liens de toute nature qui doivent unir la vieille