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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 18.djvu/961

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niement de notre double système de dépenses et de revenus. Si l’on attachait l’opinion à ces discussions financières où se trouve la solution de la plupart des problèmes politiques et sociaux posés encore à la France, l’esprit public ne se laisserait plus égarer aux funestes et folles préoccupations qui l’agitent de temps en temps. Si l’on était plus généralement pénétré de l’importance des questions financières, si l’on avait bien présens à l’esprit les embarras et les charges que nous a suscités la dernière guerre, et que nous n’avons pas encore fini de subir, aurait-on provoqué si légèrement, il y a quelques semaines, la perspective d’une guerre entreprise dès demain par la France pour l’émancipation de l’Italie ? Une note du Moniteur a coupé court en France à cette échauffourée des imaginations, provoquée sur de faux bruits par des déclamations inconsidérées. En France, cette alerte avait sérieusement alarmé les esprits et les intérêts. En Italie, et notamment en Piémont, elle avait surexcité l’exaltation habituelle qu’entretient ce que l’on appelle au-delà des monts la question italienne. Cette émotion, nous dit-on, s’est cependant un peu calmée. M. Mazzini a saisi cette occasion pour lancer un de ces manifestes qui ne manquent jamais de nous avertir, aux dépens de la cause dont il est l’apôtre, des dissensions qui divisent les partisans de l’indépendance italienne. Nous ne contesterons jamais, pour notre part, à un peuple mal gouverné ou tyrannisé par une domination étrangère le droit d’aspirer à l’indépendance et de reconquérir sa liberté. Le droit d’un tei peuple ne périme point. Il peut le faire valoir en tout temps et à son gré, mais c’est à la condition de ne point appeler l’appui de l’étranger pour repousser l’étranger, et, dans les temps de calme général, de n’exposer que lui-même aux chances de son entreprise. C’était ce que disaient les Italiens en 1848 : l’Italia farà da se. Pourtant en 1848 l’Europe tout entière était remuée, et il était permis à l’Italie de choisir et de rechercher des alliances contre l’Autriche parmi les combinaisons nouvelles que la révolution générale avait produites. Il n’en est plus ainsi aujourd’hui : pour retrouver l’occasion perdue en 1848, il faut que l’Italie sache l’attendre. Les Italiens sont malheureux sans doute, mais sont-ils les seuls malheureux dans la constitution actuelle de l’Europe ? Et croient-ils que cette constitution soit si bien assise, que l’espérance sérieuse, celle qui se prépare au succès et le mérite par la patience, leur soit interdite ? L’Italie et le Piémont à sa tête ont de nombreux amis en Europe ; ils ont les sympathies de la France libérale et de l’Angleterre ; les griefs de la Russie contre l’Autriche assurent au besoin au Piémont et à l’Italie un concours inspiré par une autre passion que l’amour de la liberté et du droit des nationalités, mais qui ne serait pas moins efficace. L’Italie a donc de puissans amis ; mais elle ne doit pas se dissimuler que la question italienne n’est point la seule question européenne : pour, qu’elle le devienne un jour, il faut un concours de circonstances et des rapprochemens d’intérêts qu’il n’est point au pouvoir des Italiens de créer à volonté, et particulièrement dans le moment présent.

Il serait sans doute intéressant de parcourir les divers pays constitutionnels qui, dans ces derniers temps, viennent de rouvrir leurs sessions parlementaires. Sauf le Portugal, où l’on attend les débats sur l’affaire du Charles-et-George, ces divers parlemens ne donnent aucun signe d’émotion. Du côté de l’Espagne, on peut s’attendre sans doute à des caprices ; mais