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Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 26.djvu/809

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une committee room, une conversation room, un washing apartment consacré aux soins de la toilette, une news room avec une table sur laquelle se trouvent les journaux, une bibliothèque et une class room ou se font des cours sur les différentes branches de l’instruction élémentaire. On ne s’attend point sans doute à rencontrer dans ce working men’s club les splendeurs de l’Athenœum ni des autres clubs du West-End ; mais l’établissement est éclairé au gaz ; bien chauffé et meublé avec cette simplicité modeste qui n’exclut point un certain goût. L’intention des fondateurs a été de fournir aux ouvriers le comfort et les amusemens de la vie dans des conditions que le meilleur public home ne saurait remplir. Ils ont voulu en même temps écarter les dangers et les tentations artificielles du cabaret. Ici, personne ne gagne sur les objets de consommation ; on ne pousse donc point à la dépense. La contribution qui confère aux membres du club leurs privilèges est extrêmement légère : un penny par semaine. Moyennant une si faible somme, le café et le thé sont servis au prix coûtant. Le nouveau club, auquel est annexée une caisse d’épargne, a déjà porté de bons fruits : il a relevé la dignité morale et développé les goûts d’économie chez certains ouvriers, qui naguère dissipaient leur temps et leur argent dans les tap rooms. La même expérience a été faite et avec le même succès, à trois milles de Londres, dans un pittoresque village qui porte le nom de Hampstead, et dans quelques endroits de l’Ecosse. Plusieurs moralistes anglais se sont demandé si de telles maisons, servant de rendez-vous aux artisans des villes et aux laboureurs des campagnes, ne devraient point s’élever dans tout le royaume-uni. Quand les ouvriers sont mariés, leur club naturel est la famille ; mais la plupart des jeunes ouvriers se trouvent condamnés à la vie du célibat : que rencontrent-ils après une journée de fatigue ? Une pauvre chambre garnie, un foyer éteint, des murs tristes, la solitude ! Pour fuir cette sombre vision du domicile morne, abandonné, ils courent au beer shop, où les attend une autre ennemie, l’intempérance. Entre ces deux écueils se présente le club house, sorte de chez-soi pour tous, avec un bon feu qui flambe, la clarté du gaz qui réjouit, de braves compagnons qui racontent les nouvelles, et, pour ceux qui savent lire, les meilleurs amis du pauvre, les livres, les journaux et les recueils de tout genre[1].

  1. Parmi les essais de club houses professionnels et fondés par la classe inférieure, je ne dois point oublier le Cabmen’s Club. Les cochers de voitures publiques, fiacres et cabriolets ont loué dans Bell-street, Paddington, une maison qui est ouverte tous les jours de huit heures du matin à onze heures du soir aux membres de l’association, et où ils jouissent des avantages d’un cabinet de lecture, d’une bibliothèque et d’une salle de rafraîchissemens. Un meeting présidé il y a quelques semaines par lord Shaftesbury avait pour principal objet le développement de ces clubs. Depuis, une nouvelle maison pour les cochers de voitures publiques s’est ouverte déjà dans Field-street, King’s-Cross.