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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 38.djvu/124

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et un des souverains secondaires nommé par les états secondaires de l’Allemagne : importante innovation, si elle était adoptée, c’est-à-dire si le dualisme qui affaiblit en ce moment l’Allemagne consentait à abdiquer en acceptant un tel partage du pouvoir ! Comme il divise la répartition du pouvoir exécutif, M. de Beust divise aussi, dans le même intérêt, la présidence de la diète germanique ; il propose que l’Autriche ne l’exerce plus qu’à de certains intervalles et à son tour : grave sacrifice à obtenir de la part de cette puissance, à qui, en 1815, ce privilège avait été réservé comme un héritage et un reste de l’ancienne dignité impériale ! — Le second trait principal du projet de réforme présenté par M. de Beust est l’adjonction à la diète germanique renouvelée d’une chambre composée de députés choisis dans les parlemens des divers états de l’Allemagne et élus par ces mêmes parlemens. Jusqu’à ce jour en effet, on a reproché avec raison à la diète de Francfort de ne réunir que les plénipotentiaires des princes et par conséquent de ne pas représenter véritablement la nation. La chambre nouvelle imaginée par M. de Beust comblerait cette lacune et réparerait cette injustice ; elle aurait pour résultat aussi d’établir un contact plus intime et plus fréquent entre les différens membres de l’association fédérale ; elle créerait ce contact particulièrement pour ce qui concerne les peuples, comme l’ancienne diète, conservée avec la même composition par M. de Beust, le créait pour les princes. — M. de Beust s’efforce enfin de parer aux divisions intérieures par l’institution d’un tribunal fédéral chargé de vicier les dissentimens, sans qu’il soit nécessaire que la diète elle-même en soit saisie, comme il s’efforce de procurer à l’Allemagne une plus forte initiative au dehors par la création de son directoire exécutif.

M. de Beust est un esprit d’une rare finesse ; a-t-il pensé que son projet serait accepté des autres états de l’Allemagne et l’a-t-il jugé lui-même aisément réalisable ? Quant au premier point, nous ne saurions douter qu’il ne connût à l’avance ou ne prévît les oppositions qu’il devait rencontrer plus tard, et quant au second, il est permis d’éprouver quelque incertitude quand on lit avec attention le Mémoire et le Supplément qu’il a publiés à la suite de son Projet pour en expliquer et développer les intentions principales. Dans un passage du Supplément, il est vrai, le ministre saxon paraît s’applaudir du jeu que donneraient ses combinaisons nouvelles aux différens ressorts de la constitution fédérale, aujourd’hui si difficiles à mouvoir. « Reportons-nous par le souvenir, dit-il, vers les complications funestes en présence desquelles on se trouvait pendant le printemps de 1859. Aujourd’hui encore les vues peuvent diverger sur l’interprétation des faits qui s’accomplirent alors, mais