Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 38.djvu/394

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

présida et l’anima de son esprit. Il supprima la taxe sur les bestiaux, qui mettait obstacle à la seule industrie agricole un peu profitable, encouragea la destruction des loups, introduisit la culture du trèfle et, ce qui vaut mieux encore, celle de la pomme de terre, véritable trésor de ces contrées montagneuses. Le haras de Pompadour fut créé sous son administration, en 1763, du vivant même de la fameuse favorite, qui prêtait l’oreille depuis quelque temps aux idées économiques de son médecin Quesnay. En industrie, il abolit bon nombre de règlemens pernicieux, et il dirigea les premiers essais pour la fabrication de la porcelaine. Enfin, quand survint l’effroyable disette de 1770, il préserva la province des derniers malheurs en établissant partout des bureaux et des ateliers de charité, avec le concours actif des curés et des autres membres du clergé.

Ceci se passait dans les dernières années de Louis XV. On a souvent reproché aux économistes de ce temps d’avoir cherché leur point d’appui dans l’autorité absolue du roi. Pouvaient-ils agir autrement ? Turgot se servait, pour faire le bien, des pouvoirs dont il était revêtu, mais il ne se dissimulait nullement qu’un homme, quel qu’il fût, n’y suffisait pas, et dès qu’il devint ministre, il proposa au nouveau roi de substituer des assemblées électives à l’administration despotique des intendans. Rien de pareil n’était possible sous Louis XV. L’intendant du Limousin ne pouvait que se renfermer dans sa province, pour y mettre en pratique ses principes. Dix ans avant les premières assemblées provinciales de Necker, vingt ans avant l’édit de 1787, un homme qui réunissait le génie et la vertu essayait, dans un des coins les plus obscurs et les plus abandonnés du territoire, ce qui devait un jour transformer la France entière. Ce qu’il avait commencé, l’assemblée du Limousin l’aurait certainement poursuivi, si elle avait pu s’établir et durer.


II. — AUVERGNE.

La généralité de Riom, comprenant l’ancienne Auvergne, ou les deux départemens actuels du Puy-de-Dôme et du Cantal, avec une fraction de la Haute-Loire, se divisait en sept élections, qui forment aujourd’hui dix arrondissemens : Riom, Brioude, Mauriac, Clermont, Aurillac, Saint-Flour et Issoire[1]. L’assemblée provinciale ne fut pas convoquée à Riom, capitale de la généralité, mais à Clermont, ville plus importante et un peu plus centrale. Riom fit valoir ses antiques privilèges, mais sans succès ; déjà commençait ce déplacement qui a doublé depuis un siècle la population de Clermont et qui a réduit au contraire celle de Riom. L’assemblée se composait

  1. Les nouveaux chefs-lieux sont Thiers, Ambert et Murat.