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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 38.djvu/59

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entre autres du beurre pour 7 ou 8 millions de francs, des œufs et des fruits pour 3 ou 4 millions, des chevaux, des porcs, etc. ; mais d’autre part elles importent généralement une assez notable quantité de céréales. On peut compter qu’il leur faut, année moyenne, un demi-million d’hectolitres de seigle et de froment et autant d’orge, celle-ci nécessaire pour fabriquer les 7 millions d’hectolitres de bière que livrent les 2,670 brasseries répandues dans le pays. La production agricole restant chaque année au-dessous de la consommation, il était absurde et inhumain de maintenir des droits protecteurs. Aussi ces droits ont-ils été abolis sans que l’agriculture ait fait entendre une plainte ou une réclamation. Au reste, le prix des céréales est toujours extrêmement élevé en Belgique. Elles s’y vendent souvent plus cher qu’en Angleterre même, tandis que jusqu’en 1815 elles se cotaient à un tiers de moins que dans ce dernier pays.

M. Léonce de Lavergne a fait remarquer avec raison combien il est difficile de déterminer la valeur de la production totale de l’agriculture chez une nation, et surtout de comparer les chiffres qu’on obtient avec ceux d’autres pays. Non-seulement les résultats sont toujours loin d’une exactitude rigoureuse, mais les bases d’estimation varient, et la valeur vénale diffère d’une contrée à l’autre. Le recensement officiel de l’agriculture belge de 1846, après des recherches minutieuses et des calculs vérifiés avec le plus grand soin, arrivait au chiffre global de 753 millions, chiffre que les auteurs de cet excellent travail croient trop faible, et qui doit, d’après eux, approcher en réalité de près d’un milliard. À ce compte, le produit brut de l’agriculture serait beaucoup plus élevé en Belgique, où il monterait à 344 francs par hectare de superficie totale, que dans les îles britanniques, où il n’atteint que 135 francs ; mais le chiffre officiel ne nous paraît pas pouvoir être admis, car il renferme certains élémens qu’on ne peut faire figurer dans la liste des produits, la paille et les engrais par exemple, qui font évidemment partie du capital d’exploitation, puisque dans quelques parties du, pays le fermier doit les reprendre sur estimation, et d’ailleurs on a omis certains articles, tels que les jeunes chevaux livrés au commerce, et on en a porté d’autres trop au-dessous de leur valeur réelle, comme le lait, qu’on estime seulement-5 centimes le litre. En adoptant les bases dont s’est servi M. de Lavergne pour dresser ici même[1] les tableaux comparés de la production agricole de la France et de l’Angleterre avant 1848, on arriverait à des résultats plus approximatifs, desquels il résulte qu’avec un territoire de moins de 3 millions d’hectares, la Belgique obtient un produit brut de plus d’un demi-milliard de francs, ou exactement de 180 francs

  1. Voyez la Revue du 1er mars 1853.