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Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 91.djvu/356

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interrompue. Dès l’année 1817, Freycinet, commandant les corvettes l’Uranie et la Physicienne, mettait à la voile pour un voyage d’explorations autour du monde. Partaient ensuite Duperrey avec la Coquille, Dumont-d’Urville avec l'Astrolabe, La Place avec la Favorite, Dupetit-Thouars avec la Vénus. On envoyait des navires dans les mers du nord, et des savans étaient chargés d’étudier les côtes de l’Islande et du Groenland. Enfin Dumomt-d’Urville devait conduire l'Astrolabe et la Zélée dans les mers du sud, et rencontrer la terre Adélie. Dans ces expéditions se distinguèrent les membres du service de santé de la marine : Garnot, Lesson, Gaudichaud, Quoy, Gaimard, Eydoux, Souleyet et d’autres encore. Les voyages de circumnavigation eurent de sérieux avantages pour les sciences physiques et naturelles, et si des hommes spéciaux avaient toujours été appelés à y prendre part, ils auraient procuré des résultats d’une importance autrement considérable.. Tout s’est trouvé abandonné le jour où les progrès dés sciences allaient permettre de rendre les expéditions maritimes plus fécondes. Il y a peu d’années, mû par l’espoir de réveiller le goût des découvertes, nous avons cherché à remettre en mémoire les anciens services de la marine pendant les campagnes d’exploration, nous avons exprimé le regret de manquer aujourd’hui d’un concours nécessaire pour l’exécution de travaux qui seraient un honneur pour le pays[1]. L’appel n’a pas été entendu. L’idée de disposer d’un navire pour des études scientifiques n’était plus de notre époque.


II.

Une opinion fâcheuse, parce qu’elle était décourageante pour la recherche, s’était propagée. Ou regardât comme très probable l’absence d’êtres vivans dans les grandes profondeurs de la mer. Les preuves faisaient défaut, et l’ignorance se dissimulait involontairement par des explications capables de satisfaire l’esprit. Les raisons de croire le lit de l’Océan absolument inhabitable paraissaient nombreuses. On songeait à la pression énorme qui devrait écraser tous les corps, à la température très basse, à l’obscurité sans doute complète dans les abîmes. À la vérité, les hommes de science, encore incertains, gardaient une prudente réserve ; mais par malheur quelques observations insuffisantes et trop aisément généralisées semblèrent confirmer toutes les suppositions. Edwards Forbes, si jus-

  1. Nous avions à signaler les observations d’un officier de marine, M. Henri Jouan, qui avait mis à profit son séjour en différentes parties du monde pour recueillir une foule de renseignemens utiles sur les productions naturelles.