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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 100.djvu/519

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particulières[1]. Les terres arables de toute nature étaient périodiquement tirées au sort. Ce régime s’est maintenu à Saarholzbach jusqu’en 1863. Dans les autres communes, la propriété privée s’était introduite dans la période de 1811 à 1834, par suite des opérations du cadastre. Dans la plupart des communes du bassin de la Moselle et de la Saar, le partage avec tirage au sort a cessé, vers la fin du siècle dernier, pour les terres arables ; mais il est encore en usage pour les prairies et pour les bois.

Beaucoup de communes de l’Eifel, région élevée et froide, située entre le Rhin et l’Ardenne belge, partagent de la même façon les grandes landes qu’elles possèdent. Chaque lot est cultivé pendant une année et retourne ensuite à la vaine pâture. Dans le pays de Siegen, les communes possèdent de fort beaux bois de chêne en taillis qui, exploités tous les vingt ans, fournissent du chauffage et surtout des écorces à tan. Quand le taillis est enlevé, la superficie est incinérée et donne ainsi, sans engrais, une bonne récolte de seigle. La partie de ces bois qui est à coupe est partagée chaque année en lots qui sont tirés au sort entre les habitans.

Dans les villages de la Sarre et de la Moselle, le partage se faisait d’abord tous les trois ans, puis tous les six, douze ou dix-huit ans. Les époques de la répartition tendant ainsi à s’éloigner de plus en plus, l’habitude de la propriété individuelle s’établissait, et celle-ci prenait insensiblement la place de la communauté primitive. Cependant la coutume du partage était si profondément enracinée, qu’on y revenait parfois après un long intervalle. Ainsi, dans le village de Losheim, aucun partage ne s’était plus fait de 1655 à 1724 ; mais dans cette dernière année la commune résolut de rétablir le partage des terres, « attendu que, par suite des décès et des mariages, les parcelles sont devenues si petites que même le plus aisé des habitans ne peut convenablement fumer et améliorer ses pièces de terre, tant elles sont étroites et dispersées. » M. A. Meitzen a reproduit, dans son grand ouvrage sur le Sol et la Culture en Prusse, un plan parcellaire de la commune de Saarholzbach, où l’on voit clairement comment se faisait le partage. La terre arable est divisée en champs de forme rectangulaire, et chacun de ces champs est subdivisé en parcelles. On formait un lot en réunissant plusieurs de ces parcelles. En 1862, la commune comptait 98 co-partageans, et ses 104 hectares de terre arable étaient subdivisés en 1,916 parcelles. Elle possédait en outre des bois et une grande étendue de terres vagues ; celles-ci étaient partagées tous les ans.

  1. C’est à M. Hanssecn qu’on doit la description exacte de ces curieuses coutumes. Voyez Die Gehöferschaften im Begierungsbesirk Trier. — M. A. Meitzen, dans son grand ouvrage Der Boden des preussischen Staates, a complété cette étude.