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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 1.djvu/127

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sache bien que nous ne nous laisserons ni enlever ni contester les traités qui garantissent les territoires actuels. Le reste n’est tout bonnement que bagatelles et misères. »

« 23 novembre 1852.

« Devons-nous, à nous quatre, en reconnaissant l’empereur, exiger comme condition la garantie des territoires, ou bien faut-il simplement l’insinuer comme sous-entendu à propos et dans le texte même de la reconnaissance ? Nous, puissances continentales, nous serons du premier avis ; l’Angleterre sans doute adoptera le second. Si nous n’avons pas dès le début une pensée commune, une pensée d’entente à ce sujet, nous pourrons siéger à Londres jusqu’à ce que les Français nous en délogent. Or il m’est venu à l’esprit un de ces points d’entente, un modus ; j’en ai parlé à Manteuffel, qui l’approuve, et je vous le communique sans retard. Ce point, ce modus, c’est un renouvellement des garanties territoriales au moyen d’un acte officiel signé et ratifié par les quatre puissances, quelque chose comme ceci : les quatre hautes puissances, etc…, renouvellent par la présente la garantie des possessions territoriales telles qu’elles ont été stipulées dans les traités, etc…, les maintiendront les armes à la main contre quiconque les enfreindrait, etc.

« Quand nous aurons entre les mains cet acte paraphé, signé et contre-signé, la question de savoir si nous devons exiger que Louis y prenne part avant d’être reconnu empereur, ou bien le lui offrir soit au moment de la reconnaissance, soit après, cette question, à mon avis, est assez indifférente. La seule chose essentielle, c’est que Louis Bonaparte apprenne et sache que les quatre grandes puissances ont garanti de nouveau les territoires et sont décidées de la façon la plus expresse à les maintenir. Alors Louis Bonaparte saura quels obstacles l’empêcheront de réaliser le plan de son oncle, suivant lequel sa dynastie, au bout de tant et tant d’années, devait être la plus ancienne de l’Europe. Faites pénétrer cette idée, comme bon vous semblera, dans le cabinet de Londres et chez la reine, puis dites-moi si vous avez lieu d’espérer que cette ancre assurée de salut pour la paix européenne (je parle au point de vue purement humain) sera forgée comme je le désire. J’ai donné des instructions pour que mon cabinet propose cette idée simultanément à Londres, à Pétersbourg et à Vienne.

« Frédéric-Guillaume. »

Le roi s’était bercé de vaines espérances, les Anglais ont le sens plus pratique. Les tories n’étaient pas plus disposés que les whigs à prendre des mesures qui auraient semblé une menace. Lord Palmerston et lord John Russell avaient parlé avec bon sens des difficultés de la France en 1851, de l’imminence du péril social, et ils avaient exprimé leur confiance dans un homme qui connaissait si bien le tempérament politique de l’Angleterre ; le comte Malmes-