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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 1.djvu/642

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avant l’arrivée des armées allemandes. Un moment à Berlin on avait eu quelque préoccupation. On se disait que la France ne pouvait avoir « ainsi renoncé aux avantages d’une mobilisation régulière » sans se proposer quelque grand résultat, sans vouloir profiter d’une supériorité numérique du premier instant pour se jeter dans « la province rhénane et dans le Palatinat, pour s’opposer à la concentration des armées allemandes sur la rive gauche du Rhin. » C’est sous l’impression de cette crainte qu’on avait pris ses mesures pour ramener en arrière les services de mobilisation de la division rhénane en ne laissant sur la frontière qu’un rideau de cavaliers qui étaient là moins pour combattre que pour servir d’éclaireurs. On allait même jusqu’à prévoir le cas où l’on devrait arrêter sur le Rhin la marche des trois armées pour engager la campagne dans les conditions nouvelles que créerait l’irruption française ; mais l’état-major allemand ne tardait pas à démêler la vérité et à se rassurer. Il comprenait qu’il regagnerait bien vite le temps qu’il semblait nous laisser, et dont les chefs de l’armée française perdaient de jour en jour la chance de profiter. Dès que la mobilisation était achevée, et elle l’était dans certains corps le 24 juillet, les grands transports pouvaient commencer par toutes les voies ferrées, dont quelques-unes franchissaient le Rhin pour aboutir à Neunkirchen, à Hombourg, à Landau, continuant de là vers la France. Par la combinaison d’une mobilisation savamment préparée et d’une appropriation méthodique des chemins de fer aux nécessités militaires, on échappait aux plus dangereux mécomptes. Un corps organisé dans sa région, avec ses réserves et son matériel, pouvait s’embarquer au complet, les trains se succédant d’heure en heure, les combattans partant les premiers, puis les voitures, les équipages. Tout était réglé de façon à éviter les confusions et à maintenir l’intégrité des troupes en marche. Le 25 juillet, cet immense mouvement avait commencé pour ne plus s’interrompre.

À dater du 28, les masses allemandes dépassaient déjà le Rhin, au moins par leurs têtes de colonnes, incessamment suivies du gros des forces combattantes. La Ire armée se montrait déjà en partie à Trèves. La IIe armée, débouchant par Mayence et Manheim, s’avançait sur Kaiserslautern. Le Ve, le XIe corps de la IIIe armée, et les Bavarois, les Wurtembergeois, commençaient à se réunir autour de Landau. Le 30 juillet, le prince royal, après avoir visité Munich, Stuttgart, Carlsruhe, était à Spire. Le même jour, le prince Frédéric-Charles était au centre des mouvemens de la IIe armée. Le vieux Steinmetz avait pris, lui aussi, le commandement de ses troupes dont la marche sur la Sarre devait nécessairement se mesurer aux progrès des colonnes du prince Frédéric-Charles. À une question de l’état-major supérieur demandant le 31 juillet aux commandans en chef à quelle date ils