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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 5.djvu/465

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 septembre 1874.

On peut en être assuré, bien des années passeront ramenant invariablement pour l’Europe, comme pour la France, les mêmes préoccupations, le souvenir des mêmes événemens. Les catastrophes comme celle qui a éprouvé notre pays et remué le monde, il y a si peu de temps encore, ces catastrophes ne s’effacent pas si vite de la mémoire des hommes et n’ont pas besoin qu’on les rappelle par le son des cloches. Le tout est de savoir se souvenir. Un journal étranger remarquait récemment que dans une histoire où les prodiges militaires ne manquent pas, aux heures de ses prospérités les plus éclatantes et en apparence les plus continues, la France n’avait jamais choisi une bataille victorieuse, pas plus léna qu’Austerlitz, pour en consacrer l’anniversaire par une fête nationale. L’Allemagne, qui est une grande initiatrice, croit devoir faire autrement. Elle aurait pu, en se donnant la même satisfaction d’orgueil, choisir une journée d’un caractère plus politique, plus élevé, celle de la résurrection officielle de l’empire germanique à Versailles, celle de la signature de la paix qui sanctionnait et couronnait ses victoires ; elle a préféré perpétuer un souvenir qui ne parle que de la force des armes et dédier ses hommages à la fortune changeante des batailles. Elle a choisi l’anniversaire de Sedan comme fête commémorative de la dernière guerre, — sans doute pour mieux prouver qu’elle est toujours la nation pacifique et humanitaire ! Les Allemands ont pu passer tout à leur aise en réjouissances cette journée du 2 septembre qui est désormais inscrite dans leur almanach officiel, et quelques Bavarois ont eu même la pensée de rappeler dans leurs effusions l’incendie de Bazeilles : la fête nationale a été complète ! Il y a eu un moment, il est vrai, quelques nuages, quelques désaccords, et M. l’archevêque de Mayence, imité en cela par M. l’archevêque de Munich, a refusé le concours de son clergé et de ses cloches au cérémonial ; mais c’est là une affaire de