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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 5.djvu/643

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il l’a prouvé devant Bilbao. C’est le général Elio qui commandait alors les troupes assiégeantes : vétéran de l’ancienne guerre, Elio s’était trouvé mêlé successivement à toutes les tentatives du parti carliste depuis 1840 ; pris dans la dernière en compagnie du comte de Montemolin ; il reçut d’Isabelle II grâce de la vie. Il est vieux, cassé, et, bien que d’une bravoure incontestable, on lui reproche de trop aimer ses aises et de manquer d’activité. Le fait est que, peu après la levée du siège de Bilbao, il s’empressa de quitter la place et rentra en France chargé d’une mission diplomatique ; Dorregaray lui a succédé, et la mission durait encore quand le gouvernement français a pris le parti de le faire interner. Le marquis de Valdespina est un seigneur des provinces basques qui a passé toute sa vie dans ses terres ; homme à convictions, honnête, respectable, fort distingué dans ses façons, mais n’ayant rien de militaire ; il s’est trouvé improvisé général. Mendiri serait peut-être plus redoutable ; natif de la Navarre, il connaît admirablement le terrain des provinces où se fait la guerre ; il a toujours servi avec honneur, mais il est vieux, il sort de la troupe, et manque de l’instruction nécessaire à un général en chef. Lizzaraga également, malgré des qualités réelles, ne peut aspirer au premier rang. De mœurs rigides et sévères, le sentiment religieux, plus encore que les convictions politiques, l’a entraîné parmi les carlistes : c’est lui qui, pour rester fidèle au règlement, fait réciter chaque soir le rosaire à ses troupes ; mais chef d’état-major de Catalogne, il laisse exécuter les massacres d’Olot. Viñalet, ancien officier de marine, aujourd’hui diplomate et ministre des affaires étrangères auprès de don Carlos, est uniquement connu pour avoir perdu deux navires de guerre dans les eaux de Cuba. Plus que les précédens, Dorregaray est jeune, ambitieux ; la guerre du Maroc le trouva capitaine d’une compagnie de forçats armés ; à son retour de Cuba, où il était allé en 1865 comme lieutenant-colonel, il passa aux carlistes ; même dans le parti on espère peu de ses capacités militaires. Quant à Saballs et à ce Tristany Francisco dont il a été beaucoup parlé dans ces derniers temps, le premier fut capitaine des zouaves pontificaux, le second a commandé une bande dans la Calabre au nom de François II : tous les deux viennent d’échouer devant Puycerda. En somme, on ne trouverait parmi eux aucun homme réellement supérieur, capable de diriger de vastes opérations : ainsi s’explique l’absence de stratégie des généraux carlistes ; ils s’en tiennent tous au système de guerillas, procédant par surprises et par coups de main, sans plan de campagne bien arrêté. Naturelle au début de l’insurrection, cette tactique n’a plus sa raison d’être, aujourd’hui que les bandes se sont accrues au point de former des armées.

Il est un homme cependant dont la présence eût pu sinon assurer