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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 5.djvu/664

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le gouvernement perçoit lui-même la dîme, on prétend que les concussions de ses propres agens font encore plus perdre au trésor que la spéculation des dimiers.

Quelques droits imposés sur les soies, sur les spiritueux, un nouvel impôt sur le papier timbré, ne donnent que de faibles résultats. Le revenu des douanes enfin ne dépasse pas 416 millions de francs pour 1874 ; il y a de ce chef une diminution prévue de près de h millions, contre une augmentation de plus du double dans le produit des tabacs. La diminution des douanes vient de l’abolition des douanes intérieures, qui frappaient la circulation des denrées de province à province, et l’augmentation du produit des tabacs d’un essai de régie à Constantinople et d’un impôt perçu sur toute la consommation intérieure. La Turquie a pratiqué bien avant nous le régime de la libre introduction des marchandises étrangères ; par une singulière anomalie, quand les objets importés payaient à l’entrée 3 pour 100 seulement de leur valeur, les objets exportés acquittaient un droit de 9 pour 100 à la sortie des provinces et acquittaient en outre 3 pour 100 de droit d’embarquement en prenant la voie de mer, la seule praticable jusqu’ici. Le produit des douanes serait susceptible d’une grande augmentation, si les moyens de contrôle et de perception ne faisaient pas défaut, c’est-à-dire s’il y avait des quais, des docks, des octrois, surtout des douaniers possibles, en un mot si le matériel et le personnel existaient. Il en est de même du produit des tabacs.

Parmi les réformes que M. Collas préconisait dès 1864, et dont la plupart ont été adoptées ou tentées, l’établissement d’un régime sur les tabacs analogue à celui qui donne en France de si merveilleux résultats a été indiqué comme suffisant seul à restaurer les finances turques. Dans un pays où le tabac est un produit indigène, où tout le monde fume, même les femmes et les enfans, où la qualité spéciale du produit se prête à l’exportation, le revenu de la taxe qui le frappe devrait dépasser de beaucoup la somme de 33 millions qu’on a prévue pour 1874. La production du tabac pour tout l’empire était évaluée par M. Collas à 38 millions 1/2 de kilogr. ; le revenu pour l’état n’atteignait pas 6 millions de francs, non parce que le droit perçu était trop minime, mais parce que la plus grande partie du tabac consommé échappait à l’impôt, grâce à la contrebande ; d’autre part M. Collas montrait que la taxe était bien au-dessous des droits perçus dans tous les autres pays ; il estimait que le tabac pouvait facilement procurer au trésor 150 millions par an. Nous sommes bien loin de ces chiffres malgré les augmentations des dernières années, mais les mœurs opposent encore sur ce point un invincible obstacle à tout progrès. La régie établie à Constantinople