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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 5.djvu/938

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qu’entre la parole de M. le président de la république et la réalité il y a toutes les interprétations de ceux qui se disent les défenseurs privilégiés du gouvernement, qui semblent n’avoir d’autre préoccupation que d’élever une petite église du septennat, de se faire à eux-mêmes et d’imposer aux autres une certaine orthodoxie septennaliste. Veut-on une preuve de la manière dont ces défenseurs du gouvernement entendent la parole de M. le président de la république ? Pas plus tard que l’autre jour, M. le marquis de Noailles, notre ministre à Rome, s’est présenté pour le conseil-général à Bayonne, où il a été élu. Il a publié une circulaire aussi simple, aussi modérée que possible ; seulement il a prononcé le nom de la république ! Aussitôt de toutes les batteries des orthodoxes septennalistes est parti un feu roulant d’objurgations, et peu s’en est fallu qu’on n’ait réclamé la révocation de M. le marquis de Noailles. Il faut bien pourtant savoir où l’on va. Si on ne peut s’entendre avec des hommes comme M. Dufaure, M. Casimir Perier ou M. de Noailles, que veut-on ?

Depuis quelque temps en vérité, on semble jouer une singulière et peut-être une dangereuse comédie, qui se reproduit dans les élections comme dans les polémiques. Au fond, on sait bien que cette union de tous les partis modérés dont a parlé M. le président de la république implique nécessairement une action commune avec le centre gauche, et on n’a pas la puérilité de mettre en doute les sentimens conservateurs de M. Dufaure ou de M. Casimir Perier. Ce qu’on demande aux chefs du centre gauche, c’est de se désister de leurs opinions, de renoncer à leurs idées, à leurs alliances parlementaires, de passer au gouvernement sans leur programme, et comme les chefs du centre gauche se refusent à une abdication, qui d’ailleurs ne servirait à rien, ils ne sont plus que des radicaux, des otages du parti révolutionnaire qui les domine, des ennemis du gouvernement et du maréchal ! Que fait-on cependant d’un autre côté ? À l’occasion, cela s’est vu et cela se voit encore dans les élections, on accepte ou l’on subit les alliances bonapartistes, on va même jusqu’à les provoquer. Or les bonapartistes sont à coup sûr les plus audacieux contempteurs du septennat ; ils se moquent du septennat et ils s’en cachent à peine. Ils disent assez haut qu’à leurs yeux le pouvoir du maréchal de Mac-Mahon n’est qu’un moyen d’arriver paisiblement, graduellement, à l’empire. C’est là ce qui s’appelle continuer la politique du 24 mai et rester dans les limites de l’orthodoxie septennaliste ou conservatrice, de sorte que pour éluder le programme de M. Casimir Perier, qui n’était après tout que l’organisation constitutionnelle du pouvoir créé le 20 novembre 1873, on fait cause commune avec ces étranges conservateurs, les bonapartistes l On se réduit à une véritable, impossibilité de vivre qui se déguise quelquefois sous l’apparence d’une laborieuse et difficile neutralité dont les bonapartistes seuls profitent. Tout récemment, à Versailles, M. le duc de Padoue a essayé