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ces prélats sont aussi de droit membres du sénat; puis viennent les archimandrites avec un clergé séculier de près de 9,800 popes, assez généralement mariés, et environ 8,800 moines et religieuses, que renferment encore les couvens non supprimés lors de la sécularisation générale des biens ecclésiastiques. Depuis la sécularisation, l’état, s’étant adjugé les immenses domaines de l’église et des couvens, a dû prendre à sa charge l’entretien du culte ainsi que la dotation du clergé, dont tous les membres, y compris les religieux, sont aujourd’hui directement rétribués par lui.

La plupart des fêtes de l’église roumaine manquent de pompe et d’éclat. Les pâques cependant sont célébrées avec la solennité qu’elles comportent dans la religion grecque. Toute la population, sortant du grand jeûne à la nuit tombante, afflue dans les églises, qui ne désemplissent pas avant une heure très avancée, à laquelle chacun s’en retourne chez lui, un cierge à la main. Le scintillement de toutes ces lumières circulant par milliers dans les rues est très réjouissant pour l’œil et marque le passage de la dévotion à une allégresse générale. Le jeûne grec oblige aussi à des privations plus dures que celles du jeûne catholique, et la grande majorité des Roumains, hommes et femmes, l’observe avec rigidité. Même parmi les plus voltairiens, tels ne manquent pas de se signer à la vue de chaque église et de baiser révérencieusement la main de chaque prélat, qui affectent d’appeler les popes nos bonzes. C’est qu’en effet le niveau d’instruction de ces desservans, assez braves gens du reste, mais dont toute la théologie se borne ordinairement à savoir lire les prières et chanter sur le ton nasillard que prescrit leur liturgie, aurait grandement besoin d’être élevé davantage. Les moines sont, sous ce rapport, encore au-dessous des popes, mais leur nombre va chaque jour en diminuant avec les extinctions causées par la mort.

Une question d’un intérêt capital pour ce pays, c’est celle de l’instruction publique et de l’éducation populaire en particulier. Dans les classes supérieures, l’habitude des familles est depuis longtemps de faire instruire les enfans à domicile par des précepteurs ou des gouvernantes venant de France, d’Allemagne ou de Suisse, puis de les envoyer, pour finir leur éducation, à l’étranger, depuis une trentaine d’années surtout à Paris; mais en Moldavie l’incurie pour l’organisation de l’enseignement à l’intérieur était telle, il y a vingt ans, qu’il n’y avait, dans toutes les écoles publiques réunies de la principauté, pas plus de 1,400 élèves des deux sexes. Il n’y existait, en dehors de quelques institutions privées très bien entretenues par les Arméniens, 15 écoles publiques élémentaires que dans les villes; encore celles de trois districts et toutes les campagnes en étaient-elles entièrement dépourvues. L’instruction publique avait été moins