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Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 8.djvu/497

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FLAMARANDE.

vit à son père légal, vient peut-être lui dire dans le silence de la nuit et en face de l’autel : « Suis-je ton fils ? »

— Alors, Charles, il saurait son histoire, à lui ? Voici qui changerait tout et ferait peut-être échouer toutes nos combinaisons. Comment le savoir ?

— Je le saurai, répondis-je, mais il faut d’abord s’assurer que c’est lui qui est là.

La baronne me pressa de nouveau le bras. L’inconnu venait vers nous. Il se retirait. Nous nous plaçâmes de manière à le voir sans être vus. Il passa, et au reflet de lumière qui sortait de la chapelle la baronne le reconnut parfaitement ; c’était Gaston.

— Suivez-le, me dit la baronne, tâchez de le faire parler ; moi, il faut que je rentre. On ne me sait pas dehors, on pourrait fermer le donjon. Arrachez à cet enfant le secret.de sa pensée ; il le faut ! Demain, nous nous concerterons, vous et moi.

LXI

Elle rentra, et je suivis Gaston, n’espérant pas le rejoindre, car il allait sans doute s’engouffrer dans une entrée à moi inconnue de l’espélunque ; mais je comptais sans l’amour. Il prit simplement le petit chemin de la poterne où l’attendait ma filleule Charlotte, et moi, me glissant dans l’obscurité, je pus entendre leur conversation, que je transcrirai autant qu’on peut résumer un dialogue d’amour.

— Enfin, te voilà ! disait la jeune fille. J’étais tout inquiète, pourras-tu me dire à présent pourquoi M. Alphonse te commande de rester au Refuge ? Qu’est-ce qu’il y a de nouveau ?

— Il y a du nouveau, répondit le jeune homme. Quant à M. Alphonse, il n’a pas d’autre idée que de faire ici de la place pour loger ceux qui sont arrivés aujourd’hui et ceux qu’on attend demain. Il ne m’a pas défendu de sortir de sa maison ; mais écoute, et ne t’afflige plus, nos affaires vont bien, ma Charlotte ! nous voilà sauvés.

— Ah ! mon Dieu, quoi donc ?

— Tu sais que, tous les ans, je reçois, je ne sais d’où et de qui, mais de mon père assurément, de l’argent pour payer ma pension à ton père. Tu sais aussi qu’il y a eu dans une lettre, au commencement, une promesse de vingt mille francs pour m’établir à vingt et un ans. Je ne recevais plus rien, ton père croyait qu’on m’avait abandonné ou que mes parens étaient morts sans pouvoir rien faire de plus pour moi. Eh bien ! j’ai reçu aujourd’hui du facteur un gros paquet où il y a le double de ce qu’on m’avait promis. Je suis donc riche, très riche, et ton père dira oui.