Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 8.djvu/644

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec la truffe. En supposant, par une hypothèse plausible peut-être, que ces insectes, dans leurs pérégrinations d’une truffe à l’autre, puissent se faire, sans le savoir et le vouloir, des agens de dissémination de la truffe, là se bornerait leur action dans le sens de la multiplication de ce champignon : ce qu’ils font avec certitude, c’est de s’en nourrir à l’état de larves, quelques-uns même à l’état d’insecte parfait ; ce sont donc des dévoreurs de truffes (tubérivores), mais nullement des générateurs de truffes. Quelques faits très simples achèveront cette démonstration.

Voici d’abord un petit scarabée de couleur cannelle, bien connu sous le nom d’anisotoma cinnamomea, que l’on trouve fréquemment sur la truffe même dans la profondeur du sol, soit qu’il y vienne pour y pondre, soit qu’il en sorte après y avoir subi ses métamorphoses. Sa larve occupe les galeries ou les cavités qu’elle se creuse à belles dents, trouvant là le gîte et le couvert, comme le rat ermite du bon La Fontaine dans son fromage de Hollande. Six pattes écailleuses assez longues le distinguent comme larve de coléoptère des larves vermiformes et sans pattes des diptères (mouches), ses commensales ordinaires ; son abdomen, qu’il redresse à la manière des perce-oreilles et des staphylins, lui donne une attitude étrange : sa teinte blanc mat est celle des insectes voués aux ténèbres. En tout cas, c’est un hôte de la truffe, mais un hôte qui dévore sa maison. Voici maintenant des diptères ou mouches à demi-ailes transparentes. Le nombre en est assez grand, mais il faut se borner aux principales, à celles qui, dès longtemps signalées comme mouches indicatrices des truffes, décèlent en effet par leur présence sur le sol le voisinage du champignon odorant. Sans parler de certaines espèces qui ne sont pas spéciales aux tubéracées, on peut regarder comme particulièrement tubérivores les helomyza, dont l’espèce la plus commune, nommée tuberivora, plus longue que la mouche des maisons, présente une teinte générale fauve rougeâtre avec des ailes enfumées et tachées de noir. Son vol assez lourd permet aisément de la suivre et de la saisir. Presque toujours solitaire, on la voit voleter ou se poser sur le sol juste au-dessus des truffes mûres, dont elle décèle la présence au rabassaire attentif. Je viens de l’observer le 6 mars aux environs de Montpellier ; elle s’y trouve, je crois, tout l’hiver et probablement à d’autres saisons de l’année. C’est à cette mouche et à ses congénères, les helomyza lineata, pallida, ustulata, que se rapportent en grande partie les prétendues mouches truffigènes de M. Ravel et de M. Valserres. D’autres diptères, appartenant à la division dite des tipulaires florales, volent par essaims à quelque distance du sol, se balançant avec ces allures singulières que Linné, dans son style poétique, a comparées à des