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Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 121.djvu/472

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lui. Macaulny était « un charlatan », le « Sangrado de la littérature anglaise ». Freeman « était exact, mais se bornait à répéter d’une façon ennuyeuse ce que tout le monde savait ». Il disait qu’il n’avait jamais beaucoup lu l’Histoire grecque de Grote, mais il l’avait assez lue pour être écrasé de son poids. Il définissait l’histoire, telle que l’entendaient les historiens allemands, « un modèle de platitude inorganique ». C’était un homme terrible. On se rappelle avec quel mépris il parlait de Michelet, qu’il avait rencontré durant son séjour à Paris. Il paraît avoir toujours éprouvé le besoin puéril de grossir sa voix pour étonner son auditoire. Et, de fait, son œuvre a provoqué en Europe un étonnement qui dure encore. M. Strachey lui-même, après nous l’avoir montré si violent, si capricieux, si parfaitement insupportable, ne finit-il point par s’indigner de ce que l’Angleterre n’ait point racheté et transformé en musée sa petite maison de Chelsea ?

Il y a encore, dans la Century, de longues et charmantes lettres de Walt Whitman à sa mère ; le poète américain les écrivait de Washington, où il était venu sur la nouvelle, heureusement fausse, de la mort de son frère, et où il était resté près de dix ans, occupé jour et nuit à soigner, à nourrir et à égayer les soldats blessés. Comme Carlyle, Whitman a été, toute sa vie, un enfant ; mais c’était un enfant d’une autre race, un bel enfant, élevé en plein air, avide de mouvement et de liberté. Avec les négligences de leur style, ses vers sont de vrais poèmes ; son âme naïve et douce, son âme de poète s’y laisse voir plus à l’aise que dans aucun de ses livres.

Dans le Scot’s Magazine, des souvenirs sur Thomas de Quincey ; dans le Temple Bar, des souvenirs sur Thackeray : dans le Mac Clure’s Magazine, de New-York, une série d’articles sur les origines irlandaises de la famille des Brontë. Mais rien de tout cela, à vrai dire, n’est bien important. Et que l’on ne croie pas que les revues anglaises de ces derniers mois aient été uniquement remplies de souvenirs littéraires : il s’y trouve aussi, suivant l’usage, des articles intéressans sur la géographie et sur la politique, et sur la religion. Mais de ceux-là je me réserve de parler une autrefois. À vouloir d’un seul coup aborder tous les sujets, je risquerais de n’en traiter aucun avec le développement qui convient.


T. DE WYZEWA.