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le condamné doit convier la caste, enfin et surtout l’exclusion ou absolue ou temporaire. La peine, bien entendu, varie non pas seulement suivant la faute, mais, pour la même faute, suivant les usages, suivant la gravité de la décadence qu’ils ont pu subir. La fantaisie des juges, certaines considérations personnelles plus ou moins avouées, plus ou moins avouables, y jouent aussi leur rôle. Tel cas entraînera ici l’exclusion perpétuelle qui, là, paraîtra suffisamment, châtié par une expiation bénigne, Les informations ne sont pas concordantes.

L’exclusion irrévocable se fait, je pense, de plus en plus rare. Même pour des fautes très graves, elle ne doit guère être maintenue contre des gens qui disposent de quelque influence sur leurs compagnons ou de ressources suffisantes pour désarmer leur sévérité. On en parle surtout là où il s’agit de punir des relations et une communauté prolongées avec des classes méprisées et impures, ou encore des crimes véritables. C’est, à vrai dire, un châtiment beaucoup plus redoutable qu’il ne nous paraît à première vue. Comme le disait l’abbé Dubois, « cette exclusion de la caste qui a lieu pour la violation des usages ou pour quelque délit public qui déshonorerait toute la caste s’il restait impuni, est une espèce d’excommunication civile, qui prive celui qui a le malheur de l’encourir de tout commerce avec ses semblables. Elle le rend, pour ainsi dire, mort au monde… En perdant sa caste, il perd non seulement ses parens et ses amis, mais même quelquefois sa femme et ses enfans, qui aiment mieux l’abandonner tout à fait que de partager sa mauvaise fortune. Personne n’ose manger avec lui ni même lui verser une goutte d’eau… Il doit s’attendre que, partout où on le reconnaîtra, il sera évité, montré au doigt et regardé comme un réprouvé… Un simple Coudra, pour peu qu’il ait d’honneur et de délicatesse, ne voudra jamais s’allier ni communiquer même avec un brahme ainsi dégradé. » Le cérémonial est significatif : on célèbre proprement les funérailles du coupable exclu de la caste ; c’est bien la mort ci vile avec tous ses effets. Si l’exclu est un homme, sa femme et ses enfans ne peuvent rester purs et garder leur place dans la caste qu’en abandonnant le maudit. Il devient inhabile à hériter, à adopter. Ce qui est fort naturel, puisque les enfans mêmes qui lui naîtraient après son éviction, partagent son sort ; ils ne peuvent être réintégrés que s’ils délaissent leur père, s’ils se soumettent à une pénitence.

Les pénitences sont variées : ce sera un pèlerinage à quelque temple renommé, un bain dans le Gange, ou simplement un jeûne. Le coupable pourra être condamne à avoir les moustaches