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Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 121.djvu/693

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Le message annuel du président, communiqué au Congrès le 4 décembre 1893, dissipa cette dernière illusion. La déclaration relative aux affaires havaïennes y était, avec celle concernant les modifications du tarif, l’objet de l’attente générale : aussi fut-elle écoutée au milieu d’un silence profond. Déjà le paragraphe sur les incidens de Samoa et l’insistance du président à signaler le danger qu’il y avait pour la république à conclure des conventions avec les puissances étrangères en vue de régler, même avec les intentions les plus désintéressées, les questions d’administration des archipels océaniens, révélait sa volonté de se tenir à l’écart de toutes complications extérieures. Plus explicite encore au sujet des îles Havaï, il répudia nettement toute tentative d’immixtion dans le gouvernement de ces îles, toute velléité d’annexion ou de protectorat. « Il est, dit-il, superflu d’insister sur les sérieux embarras (embarrassments) qu’ont fait naître les troubles dont l’archipel havaïen a été le théâtre. Antérieurement à l’inauguration de l’administration actuelle, le gouvernement havaïen était brusquement renversé ; un traité d’annexion était négocié entre le gouvernement provisoire de ces îles et les États-Unis et soumis à l’approbation du Sénat. Ce traité, je le relirai, jusqu’à plus ample informé, et je déléguai l’Hon. James H. Blount, représentant de la Géorgie, à Honolulu, pour y procéder à une enquête sérieuse. Du rapport de M. Blount il résulte, sans doute possible, que le gouvernement légal du royaume havaïen a été renversé avec l’aide et la coopération actives de notre représentant diplomatique auprès de ce gouvernement ; que M. Stevens s’est autorisé de la présence d’un bâtiment de guerre américain dans les eaux de Honolulu pour paralyser toute résistance à un mouvement insurrectionnel, et qu’il a secondé ce mouvement en donnant l’ordre de faire débarquer des troupes en armes.

« En présence de pareils faits, la ligne de conduite à suivre est tout indiquée. Elle consiste à réparer le tort causé par ceux qui nous représentaient et à rétablir, autant que faire se pourra, l’état de choses antérieur à ces actes. Désireux d’atteindre ce résultat, agissant dans la limite des attributions du pouvoir exécutif, et reconnaissant pleinement les obligations et les responsabilités que fait peser sur nous notre inqualifiable intervention, j’ai donné à notre nouveau ministre résident à Honolulu des instructions sur la marche à suivre. J’attends ses dépêches, que je vous communiquerai par un message spécial relatant les mesures prises et vous donnant l’historique complet et détaillé de la question. »

Pareil langage est digue du chef d’une grande nation, et s’il suffisait de reconnaître les fautes commises, d’en désavouer les auteurs, de rappeler un ministre compromettant, de remplacer