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Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 124.djvu/144

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CONDITION
DE LA
FEMME AUX ÉTATS-UNIS

NOTES DE VOYAGE

I
PREMIÈRES IMPRESSIONS. — À CHICAGO
LES CLUBS DE FEMMES.

On a beaucoup écrit sur la femme aux États-Unis. M. de Varigny, dans une série d’études, a montré ici même la source de son influence[1] ; il est remonté pour cela jusqu’au temps où les héroïques exilées arrivées sur le Mayflower aidèrent leurs pères et leurs maris à bâtir la cabane primitive qui allait servir à la fois d’école et de temple. Egales de l’homme, dès le début, elles lui sont devenues supérieures, semble-t-on dire, par la culture intellectuelle et raffinement. Tandis que le chef de la famille se donne tout entier aux affaires, elles personnifient auprès de lui, — ou loin de lui, car le ménage est souvent séparé, — l’élégance, le plaisir, le luxe. Nous connaissons ces Américaines-là pour les rencontrer à Paris, et ce sont elles qu’un premier coup d’œil nous fait remarquer à New York. Peut-être toutes les femmes à la mode, dont la vie oisive se dépense entre les grandes capitales, les villes d’eaux, les stations d’hiver et les plages amusantes, sont-elles taillées à peu près sur le même modèle. Sans réelle originalité, chacune d’elles représente cette société cosmopolite qui n’a point de patrie. Leur type essentiellement artificiel a été exploité outre mesure dans le roman et au théâtre ; nous n’aurons pas à y revenir. Mais à côté des millionnaires et des beautés professionnelles, il y a en Amérique, comme ailleurs, une classe beaucoup plus nombreuse, dont on a moins parlé, celle qui équivaut à notre bourgeoisie haute et moyenne. Si l’on me fait observer que les

  1. Voyez la Revue des 15 mars, 15 mai et 1er septembre 1889.