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là où le terrain crétacé repose sur le jurassique. C’est aussi à la limite de ces deux terrains que les nodules sont exploités dans le Boulonnais, dans la Côte-d’Or, dans l’Indre, etc. Dès 1856, l’extraction commença, et quand on eut appris à reconnaître ces cailloux noirâtres arrondis, appelés d’abord « coprolithes », qui, au premier aspect, attirent peu l’attention, on les trouva très répandus, non seulement en France et en Angleterre, mais encore en Russie, disséminés sur d’immenses étendues ; plus récemment enfin, on en a découvert d’importans gisemens en Algérie et dans le sud de la Tunisie.

Les phosphates minéraux ont des caractères si mal définis, ils ressemblent tellement aux pierres, aux sables les plus vulgaires, qu’il n’est pas étonnant que pendant des siècles ils aient passé inaperçus : tel est le cas des sables phosphatés de la Somme et du Pas-de-Calais, largement exploités aujourd’hui, mais qui ont été employés pendant longtemps à faire du ciment ou à couvrir les routes. Les phosphates des terrains primitifs, les apatites, les phosphorites, sont plus faciles à reconnaître : on en a découvert des gisemens dans le Gard, dans le Tarn et le Tarn-et-Garonne ; on les rencontre en Espagne dans la vallée de la Guadiana, en Norvège, au Canada ; enfin un immense gisement de phosphates, de formes diverses, très riches, a été mis récemment en exploitation au sud des États-Unis, dans la presqu’île de la Floride.

À ces phosphates naturels s’ajoutent depuis quelques années les scories de déphosphoration. Certains minerais de fer, communs dans notre pays, en Allemagne, en Angleterre, renferment du phosphore. Les fontes qui proviennent de la fusion de ces minerais se prêtent mal à la fabrication de l’acier : pour les employer, on est obligé de les priver de phosphore en les fondant en présence de la chaux. Les scories qui se forment pendant cette fusion, riches à la fois en chaux et en acide phosphorique, conviennent très bien aux terrains pauvres en chaux ; le prix des scories, même réduites en poudre très fine, est peu élevé, leur consommation s’accroît chaque année.

Nous pouvons donc puiser au milieu d’un immense approvisionnement : le monde ne périra pas faute de phosphore. Mais comment choisir parmi toutes ces variétés d’engrais que nous offre le commerce ? Et d’abord, les phosphates sont-ils d’un emploi universel ? faut-il en répandre sur toutes les terres ? et s’il faut en répandre, qu’acheter ? Des phosphates fossiles ou des os ? des scories de déphosphoration ou les produits traités par l’acide sulfurique désignés sous le nom de superphosphates ?