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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 128.djvu/330

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s’accomplit, le combustible, le minerai, et certains calcaires stériles qui leur sont adjoints, analogues à nos moellons de bâtisse, que l’on nomme les fondans. Leur unique objet est de mieux assurer la fusion du mélange et de préserver la fonte de l’action du courant d’air.

A son entrée, lorsque le couvercle du four s’est refermé sur lui, le minerai se trouve soumis à une température de 30 à 60 degrés seulement. A mesure qu’il se dessèche, s’échauffe, s’altère et se réduit, il descend vers le ventre où les réactions s’accentuent. Dans les étalages, le fondant, qui est maintenant de la chaux, forme avec la gangue, ou partie inutilisable du minerai, un silicate fusible qu’on nomme le laitier ; le fer se combine en même temps avec du carbone et un peu de silicium qui le rendent liquide en l’amenant à l’état de fonte. C’est le moment où il tombe dans le creuset. Il fait alors de 1 300 à 1 400 degrés de chaleur. Le fourneau, pour résister à une pareille température sans éclater ni se fendre, possède, à l’intérieur de sa première enveloppe épaisse d’un mètre, deux fausses chemises en briques réfractaires, distantes l’une de l’autre de 10 centimètres, dont la plus étroite renferme le métal en fusion.

En appliquant son œil au regard de verre, large comme l’objectif d’une lorgnette, ingénieusement combiné pour permettre au maître fondeur de se rendre compte de la marche du travail, on aperçoit, à l’intérieur du cratère de cette espèce de volcan apprivoisé, danser tout blancs, dans une sarabande enragée, les morceaux de coke au milieu d’un lac de fer. Cette agitation, compagne nécessaire de la métamorphose qui s’accomplit, le mouvement forcené de ces choses en train de perdre leur forme, leur substance et jusqu’à leur nom, leur est communiqué par le vent qui entre sans discontinuer, avec une puissance de 500 chevaux-vapeur, et s’introduit entre le creuset et l’ouvrage grâce à de vastes tubes nommés tuyères.

C’est peut-être le côté de la fabrication qui surprendrait le plus les maîtres de forges des temps anciens. Cet air, happé tout à l’heure par les souffleries à même l’atmosphère, vient d’être porté dans des appareils spéciaux jusqu’à 600 degrés de chaleur avant d’être chassé dans les fours. Lorsqu’il y arrive, avec une force capable de balayer un escadron en plaine, il n’est, pour ainsi dire, plus qu’un jet de flamme, promené et rôti comme il l’a été dans des serpentins de fonte, léché de tous côtés par un gaz incandescent. Et le plus curieux est que le gaz n’est autre chose que l’oxyde de carbone, produit par la combustion même du haut fourneau. Il s’en dégage en abondance et est capté, à la partie