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Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 133.djvu/674

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servir à rien immédiatement pratique. On ne s’en fait pas des rentes. Et le sentiment que nous exprimons là, nous savons bien que nos politiciens ne le partagent pas, — et pour cause. Mais, justement, et quand la liberté de l’enseignement n’aurait d’autre utilité que de les obliger à maintenir dans notre enseignement la suprématie des études classiques, c’est pour cela que nous la défendrions et que nous la défendons encore.

Est-ce à dire toutefois qu’il n’y ait « rien à faire » ? Non, sans doute ! il y a toujours quelque chose à faire ; et, assurément, les programmes du baccalauréat ne sont pas intangibles. Ils n’ont pas toujours existé ; on les a remaniés plus d’une fois, depuis qu’ils existent ; et s’il n’y a pas de grands avantages à les modifier encore, on n’y voit pas non plus de grands inconvéniens. Nous pouvons donc nous proposer de les alléger, si peut-être ils étaient trop chargés, ou, au contraire, et si par hasard ils ne contenaient pas tout ce qu’ils devraient contenir, nous pouvons nous proposer de l’y introduire. Nous pouvons exiger de nos professeurs de facultés qu’ils se fassent une autre idée de leurs fonctions d’examinateurs, de l’examen lui-même. Et si d’ailleurs on songeait un jour à les en décharger, il y a lieu de voir comment et par qui nous les remplacerions.

Pour ce qui est d’alléger les programmes, dirai-je très franchement que je ne les trouve pas si chargés ? Un peu de latin, un peu de français, un peu d’histoire et de géographie, quoi encore ? un peu de philosophie, de géométrie, de chimie, d’histoire naturelle, ce n’est vraiment pas l’encyclopédie des connaissances humaines, et, après huit ou dix ans d’études, c’est même le moins que l’on puisse exiger d’un jeune homme. Voyez plutôt ce que l’on demande aux candidats à l’École navale, qui ne sauraient pas avoir plus de dix-sept ans, et vous semble-t-il que nos officiers de marine en soient plus « surmenés » ou moins « intelligens » ? En vérité, je commence à craindre qu’avec les plaintes un peu ridicules qu’elles font du « surmenage », les familles ne finissent par encourager dans les enfans je ne sais quel dégoût du travail ou quelle horreur de l’effort ; et cependant ce n’en est pas le temps ! Aussi faut-il toujours en revenir à la même comparaison ou à la même distinction. Si quelques jeunes gens dans nos lycées sont surmenés ou se surmènent, ce sont les, candidats à nos grandes écoles, et notamment les candidats à l’École normale supérieure ou à l’École polytechnique. C’est qu’on leur demande aujourd’hui tout ce qu’on leur demandait il y a vingt-cinq ou trente ans, et en outre toutes les nouveautés, si je puis ainsi dire, dont les progrès de la science ont enrichi depuis lors la chimie, par exemple, ou l’histoire. C’est encore et surtout, je le répète, qu’ils préparent