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Page:Revue des Deux Mondes - 1896 - tome 133.djvu/887

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prix réel d’établissement, des lignes improductives, quand il en a construit d’autres, qui ne desservaient aucun grand courant de trafic nouveau, il devait s’attendre, quel que fût le mode d’exploitation adopté, à voir les dépenses annuelles absorber la majeure partie des recettes, et ne pouvait compter sur un produit net suffisant pour couvrir les charges du capital consacré volontairement à un emploi non rémunérateur.

En fait, tous ceux qui ont suivi de près la gestion de l’administration des chemins de fer de l’État, depuis qu’elle est sortie de la période des tâtonnemens, reconnaissent qu’au point de vue des dépenses, cette gestion ne le cède en rien, comme habileté et comme économie, à celle des grandes compagnies. Au point de vue des recettes, des abaissemens notables de tarifs ont été faits, au début, avec un peu de précipitation. Il est toujours difficile d’apprécier l’influence des modifications générales des tarifs sur les variations constatées ensuite dans les recettes ; la difficulté est d’autant plus grande, dans l’espèce, qu’en 1880 et 1881, quand les tarifs du réseau d’État ont été abaissés, ses lignes étaient enchevêtrées dans celles des compagnies, de telle sorte qu’il était impossible de discerner, dans les plus-values des recettes brutes, la part due à un développement réel du trafic, et celle qui venait de simples détournement opérés au détriment des réseaux voisins. Il semble, néanmoins, qu’en ce qui concerne les voyageurs, les réformes opérées à cette époque aient été plutôt lucratives qu’onéreuses. Pour les marchandises, au contraire, si certains abaissemens ont eu d’heureux résultats, d’autres ont incontestablement entraîné des pertes de recettes que n’a pas compensées l’impulsion donnée au trafic. Du moment où la situation budgétaire ne permet pas de faire profiter les populations de toute la France de tarifs aussi réduits, on doit reconnaître qu’il est injuste que les habitans de quelques départemens profitent, au détriment des contribuables, d’une situation privilégiée au point de vue du prix des transports. On peut admettre que, si la direction du réseau d’État n’avait pas, à ses débuts, mis un peu de hâte à se concilier la faveur des habitans de la région desservie et des théoriciens qui préconisent toutes les réductions de tarifs sans distinction, ce réseau rapporterait aujourd’hui un ou deux millions de plus au Trésor. Cela ne transformerait pas les résultats financiers de son exploitation, qui tiennent à sa constitution ; il serait tout à fait injuste de les imputer à une administration toujours zélée, et qui avait acquis, par une pratique déjà longue, l’expérience indispensable.


En dehors de son réseau, l’État possède quelques lignes affermées.