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Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 140.djvu/817

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le doyen glorieux de cette branche industrielle dont il est demeuré le prince, avait commencé à travailler et par lui le petit miroir était mis désormais à la portée du grand public.

Toutefois si les prix payés pour la fameuse galerie de Versailles (1684) et pour les châteaux royaux en général étaient extrêmement bas — une dizaine de francs actuels — lorsqu’il s’agissait de morceaux n’excédant pas 17 centimètres, ils s’élevaient avec une prodigieuse rapidité aussitôt que les proportions augmentaient, si bien qu’une glace de 1m,25 revenait à quatorze cents francs, tandis que sa pareille, aujourd’hui tout ordinaire, vaudrait seulement 49 francs en premier choix. L’extrême cherté des types supérieurs à une taille qui nous semble infime obligeait nos pères à combiner des trumeaux de plusieurs glaces juxtaposées, et leur faisait une loi de ce morcellement des fenêtres et des portes en petits carreaux, qu’une mode nouvelle se plaît à imiter, uniquement parce que les vitrages d’une seule pièce, ce luxe auquel un souverain jadis n’eût pu prétendre, sont devenus une banalité. Depuis vingt ans, en effet, les nouveaux appareils de dégrossissage et de polissage, les procédés mécaniques, par qui des masses de 400 et 500 kilogrammes reçoivent la « planimétrie » et la transparence, ont réduit de plus d’un tiers le temps nécessaire à la fabrication des glaces.

Entre l’enveloppe extérieure de maçonnerie et sa doublure intérieure de plâtre, de peinture et de bois, entre cuir et chair pourrait-on dire, s’il s’agissait d’une personne vivante et non d’une chose inerte, se logent les nouveaux et multiples organes qui procurent à l’habitation la chaleur et la lumière, la force et la propreté. L’ensemble des fils, des tubes ou des canaux, de métal et de grandeur variés, qui apportent ces biens précieux de façon diverse et de loin souvent, forme au-dessous et comme à travers l’immeuble que l’on voit, une maison invisible, mystérieuse et pourtant animée.

Le souffle ardent du calorifère monte du fond des caves et se répand par vingt bouches dans l’atmosphère; le courant électrique, emprunté aux câbles du secteur, palpite sous la gutta-percha, le long de ses conduits de cuivre, pour ensoleiller les lampes ou soulever les ascenseurs ; il côtoie d’autres fils qui font tressaillir des sonneries ou transportent des conversations ; le gaz glisse sans bruit dans ses branchemens de plomb jusqu’à ce qu’il sorte, avec un sifflement léger, du fourneau de la cuisine ou des becs de l’escalier. Semblable en quelque manière au corps de