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Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 142.djvu/729

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LES LUTTES ENTRE L’ÉGLISE ET L’ÉTAT.

et violentes comme des batailles, étaient trop extrêmes pour que l’Église pût rien céder, et après ces assauts elle avait gardé, dans la paix rétablie, la plénitude de ses droits. Au moment où la vigueur cléricale commençait à fléchir sous la fatigue de ces victoires, la France entra en lice, et avec une nouvelle méthode. Au lieu de déchaîner ses ambitions comme une guerre brutale, hasardeuse et courte, elle les conduisit comme un procès ouvert avec des ménagemens relatifs, restreint à des griefs précis, poursuivi sans interruption ni lassitude, et perpétué avec une intelligence calculatrice de tout ce qui pouvait être réclamé et obtenu sans rupture totale.

Le procès s’engage au début du XIVe siècle sur une question d’argent. Accrus de siècle en siècle par une foi générale et généreuse, les biens d’Église payaient alors l’entretien du clergé, les frais du culte, l’enseignement à tous ses degrés et toutes les sortes d’assistance. Pour que ces services, les premiers des services publics, ne fussent jamais compromis, le droit du temps refusait aux princes toute autorité sur ces ressources : seuls les papes et les clergés nationaux, dépositaires de cette fortune et responsables de son emploi, décidaient dans quelle mesure elle devait, après avoir rempli son principal office, pourvoir par surcroît aux charges de l’État. Philippe le Bel, au cours d’un règne toujours besogneux, met des taxes sur les biens du clergé ; Boniface VIII lui rappelle les prérogatives de l’Église ; le roi interdit que les sommes jusque-là perçues par la papauté sortent désormais de France ; pour apaiser le conflit, le pape convoque à Rome en concile les évêques français ; le roi leur défend de s’y rendre. Déjà il ne s’agit plus d’argent, mais de pouvoir : qui sera maître ? Chacun soutient sa cause avec ses armes ; le pape, dont la force est une doctrine, dénonce par ses bulles l’usurpation tentée sur son magistère religieux ; le roi, dont la force est une épée, favorise des révoltes dans les États pontificaux et humilie les derniers jours de Boniface VIII. Mais, le pape mort, la papauté reste, répète ses enseignemens, et Philippe le Bel se convainc que rien ne sera gagné s’il ne dispose de la volonté qui dispose des consciences. Il travaille à la conquérir : l’argent refusé au pape aide à faire un pape, et ce pape français rend publique, par son établissement à Avignon, sa dépendance. Aussitôt les autres souverains craignent, s’ils continuent à courber leur tête sous le magistère pontifical, de la tendre au joug français. Ils rêvent aussi d’avoir