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AU CANADA

L’ÉDUCATION ET LA SOCIÉTÉ


I

Il me serait presque impossible de donner à mes lecteurs une idée juste et vivante de la société contemporaine au Canada français, sans leur rappeler en même temps sur quelles bases s’est établie cette société, quels élémens sont entrés dans sa formation. Au fond c’était et c’est encore en miniature la société française de l’ancien régime. Le seigneur, proprement dit, a disparu devant la conquête étrangère, mais on dira la seigneurie et la noblesse tant que les manoirs resteront debout, tant qu’il subsistera des fonctionnaires et un haut clergé. En réalité la seigneurie, dans l’acception féodale du mot, est aujourd’hui la paroisse, et l’organisation paroissiale demeure la base de l’organisation municipale, l’érection de la paroisse religieuse précédant la constitution de la municipalité. C’est seulement quand l’évêque a organisé une paroisse que le décret d’érection est soumis à des commissaires de l’État qui tiennent compte de ce qui a été fait et ordonné par les autorités ecclésiastiques[1]. Ceci suffit à indiquer la prépondérance que conserve le clergé, prépondérance dont il ne faudrait peut-être pas qu’il abusât dans l’avenir, car la dîme et certaines autres taxes réclamées par l’Église commencent à paraître onéreuses.

  1. Voir l’excellent petit manuel de Droit civique de C.-J. Magnan, professeur à l’École normale Laval, qui renferme les notions les plus précises sur l’organisation politique, municipale, paroissiale, scolaire du Canada français.