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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/341

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table a été dressée. C’est, soit au premier étage, dans un des salons de F Empereur, soit chez elle, dans le premier salon de ses appartenions. Les couvreurs de table ont disposé le couvert selon les règles d’étiquette, et, selon que c’est chez l’Impératrice ou chez l’Empereur, c’est le maître d’hôtel de celui-ci ou de celle-là qui sert. Les pages présentent les assiettes qu’ils reçoivent des valets de chambre d’appartement, lesquels les tiennent du maître d’hôtel. Le repas, — potage, bœuf, un relevé, un flan, quatre entrées, deux rôts, deux entremets, deux salades, — est servi sur table ; on ne relève que pour le dessert : en quinze minutes, vingt au plus, tout est fini.

A Paris, l’Empereur et l’Impératrice dînaient toujours tête à tête, hormis le dimanche où les princes et les princesses participaient au dîner de famille. A partir de 1806, ce dîner de famille devint presque un mythe, car la plupart des princes étaient hors de France, mais le principe subsistait et, s’ils revenaient à Paris, ils reprenaient leur place. A Saint-Cloud, les princes et les princesses sur invitation spéciale, les ministres, après un travail avec l’Empereur, parfois quelques grands officiers de l’Empire ou quelques femmes, étaient admis à la table impériale. Il en était de même à l’Elysée, considéré comme résidence de campagne ; mais si cela faisait quelque diversion, si l’étiquette était un peu moins sévère, les choses pourtant se passaient à peu près de même. L’Empereur, au lieu de poser des questions au préfet du Palais, en posait aux invités, et il était indifférent à Joséphine que ce fût le bibliothécaire, le préfet, un aide de camp, un officier d’ordonnance, ou bien un ministre, car le travail, en fait, continuait, et l’Impératrice n’avait rien à y voir.

Le dîner terminé, elle rentrait avec l’Empereur dans le salon où elle lui servait elle-même le café, et — à moins qu’on n’allât à l’un des quatre théâtres impériaux, qu’il n’y eût cercle, bal, concert ou spectacle au palais, ce qui n’arrivait guère que deux fois la semaine — la soirée, fort courte d’ailleurs, se passait en tout petit comité. L’Empereur faisait appeler les officiers et les dames de service ; il arrivait, pour faire leur cour, quelques personnages qui avaient obtenu les entrées : grands dignitaires, grands officiers de la Couronne ou de l’Empire, sénateurs tout à fait en faveur et dans les bonnes grâces de l’Empereur. Après avoir dit quelques mots aux uns et aux autres, le plus souvent, Napoléon remontait travailler et, tous les hommes debout, les femmes