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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/359

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précisément parce que, ne portant pas de végétaux, elles restent humides. Il n’en serait plus de même pour une terre arrosée, qui recevrait assez d’eau pour ne pas être desséchée par la végétation et en conserverait une proportion suffisante pour assurer le travail des fermens.

La construction des canaux d’irrigation sera l’œuvre grandiose du XXe siècle, correspondant à la création des chemins de fer pendant le XIXe. Mais pour décider les pouvoirs publics à entreprendre ce grand travail, il faut que l’opinion soit saisie. Il existe dans nombre de domaines un peu accidentés des sources qui permettent des irrigations partielles ; les stations agronomiques rendraient encore un grand service en employant ces eaux et en montrant quel surcroît de récoltes est déterminé par des irrigations faites à propos.

La transformation de quelques-unes de nos écoles pratiques en stations agronomiques serait donc du plus grand intérêt. Pour que cette réforme s’accomplisse, il faut que les idées se modifient. Si, jusqu’à présent, l’administration a surtout porté ses efforts vers l’enseignement, c’est qu’elle y a été entraînée par des sollicitations pressantes ; on a cru faire œuvre utile en multipliant les écoles, et personne ne s’est avisé de réclamer des établissemens de recherches.

Or l’expérience prouve qu’on a mal compris les besoins des cultivateurs ; ils n’envoient pas d’élèves aux écoles pratiques. C’est donc qu’ils n’en reconnaissent pas l’utilité ; et, d’autre part, ils sont très désireux de s’instruire ; tous les journaux agricoles ont fait une place, souvent très large, aux questions des praticiens. Quand, par l’intermédiaire des journaux populaires, on entre en relations avec les cultivateurs, on est accablé de demandes de renseignemens, demandes souvent très judicieuses, émanant d’hommes qui réfléchissent et qu’on a grand plaisir à guider.

Les travailleurs des stations agronomiques seraient, à côté des professeurs départementaux, ces guides attitrés, et les demandes elles-mêmes leur indiqueraient dans quelle voie doivent être dirigées les recherches.

Jusqu’à présent, on n’a pas fait grand effort pour encourager les travaux originaux. Sans doute, il est des natures privilégiées qui, entraînées par le désir de savoir, n’ont nul besoin d’encouragemens ; indifférentes aux bruits extérieurs, tout entières à leur labeur, elles ne cherchent d’autre satisfaction que la joie de la