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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/875

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adopta une politique coloniale active. L’une des premières manifestations de la nouvelle orientation politique eut lieu à la côte occidentale d’Afrique. Non seulement les anciens établissemens précédemment abandonnés furent réoccupés, mais encore tous les points du littoral de la côte d’Ivoire et de la côte des esclaves qui n’étaient pas aux mains des Anglais furent déclarés territoires français. C’est ainsi que les décrets en date du 8 juin et du 8 juillet 1887 placèrent sous notre protectorat tout le pays aux environs de Grand-Bassam et d’Assinie ; les pays d’Amatifou, d’Ébrié, d’Yalassou, etc., avec lesquels le gouverneur Bayol avait conclu des traités. Nos nouveaux établissemens furent réunis sous la dénomination générale d’Etablissemens français du golfe de Bénin, et un gouverneur spécial fut chargé de leur organisation.

Par ces diverses annexions, la domination politique sur le littoral du golfe de Guinée se trouva ainsi répartie : à la France, la côte d’Ivoire et la partie de la côte des Esclaves servant de débouché au Dahomey ; à l’Angleterre, Sierra-Leone, la côte d’Or, le reste de la côte des Esclaves, la côte de l’Huile avec les embouchures du Niger. On put croire alors le partage politique du littoral de Guinée terminé. La France et l’Angleterre considéraient d’ailleurs ce partage comme un fait accompli. Elles se flattaient d’être les seules maîtresses de la région et le croyaient d’autant plus volontiers qu’elles comptaient avoir fait acte de prise de possession de tous les points de la côte. Ces prises de possession leur paraissant d’ailleurs suffire à la légitimité de leurs droits, elles ne se pressaient pas de régler leur situation de fait par un acte diplomatique qui déterminât les limites respectives de leurs établissemens. Cette négligence devait leur coûter cher. Un compétiteur surgit à l’improviste, qu’elles ne s’attendaient guère à voir intervenir dans leurs affaires. L’Allemagne, qui éprouvait à son tour le besoin de posséder des colonies, et qui était à l’affût de tous les points du globe où elle pourrait planter son pavillon, avait envoyé, en 1883, l’explorateur Nachtigal à la côte occidentale d’Afrique. Ce dernier, en furetant bien, fut assez habile pour découvrir au milieu des possessions anglaises et françaises enchevêtrées une localité qui avait échappé, par son peu d’importance même, aux convoitises de la France et de l’Angleterre, et plaça inopinément le petit pays de Togo sous la souveraineté allemande. Le nouveau voisin s’annonçait peu commode et fort disposé à de