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sont une occasion de dépenses que ne compense aucune occasion de profit devraient être supprimés. N’oublions pas non plus, nous aussi, que le Soudan n’est pas une colonie de peuplement ; que nous sommes dans une des contrées les plus chaudes du globe, et sous une latitude qui ne permet pas l’acclimatement de l’Européen ; que, dans ce pays la mortalité annuelle de nos troupes s’élève à 11 p. 100 ; et qu’il n’est nul besoin de pareilles hécatombes d’existences humaines sacrifiées au climat. C’est ce qu’ont fort bien compris, eux, les Anglais, qui ont administré jusqu’en ces derniers temps toute la vallée du Niger avec un personnel de soixante et onze Européens seulement, moindre que le nombre de fonctionnaires que nous entretenons dans la seule ville de Saint-Louis du Sénégal.

En même temps que la réduction des effectifs, nous devons ramener nos dépenses au minimum. Les soucis économiques doivent dominer aujourd’hui tous les autres. Nous devons administrer avec la plus grande économie et adopter comme règle que le Soudan, en dehors des dépenses de souveraineté proprement dite, doit se suffire à lui-même avec ses propres ressources. Si ces ressources sont insuffisantes pour ses premières dépenses d’appropriation, qu’il ait la faculté d’emprunter à ses risques et périls. Vis-à-vis des indigènes, gardons-nous de leur appliquer nos procédés de gouvernement et d’administration ; ne brisons pas les organisations politiques et sociales qui existent chez eux ; utilisons-les, au contraire, au mieux de nos intérêts. Si nous savons observer ces règles de conduite simples et sages, qu’a dictées d’ailleurs l’expérience, le Soudan pourra ne pas être pour nous une mauvaise affaire.


ROUIRE.