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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/302

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ne prendrait que quelques instans. A cet égard, il est certain que l’attaque réussira, rien ne saurait l’empêcher, car elle se produira en masse, subitement, sur un point inconnu de l’ennemi.

L’histoire est là pour prouver que les passages des grands fleuves, même en présence de l’ennemi, ont toujours réussi. La cause principale est d’un ordre psychologique : c’est la supériorité de l’attaque sur la défense.

Or, combien est plus facile de traverser un bras de mer de 40 à 60 kilomètres avec des bateaux marchant à 8 nœuds à l’heure, que de faire franchir le Danube, sur quatre ponts, à une armée, comme l’a fait Napoléon dans la nuit de Wagram, et cela en présence de toute l’armée autrichienne !

Même avec des ponts très nombreux, il faut, à une armée de 170 000 hommes, un temps considérable pour s’écouler. Avec une flottille de péniches à vapeur, il ne faut que le temps de la traversée.

En partant de Calais et de Dunkerque pour aborder sur la côte en face, ce serait l’affaire de trois ou quatre heures. En admettant qu’on choisisse Brighton, sept heures suffiraient largement.

Les points favorables au débarquement sont d’ailleurs plus nombreux qu’on ne le croit et ce ne sont pas les quelques batteries, soi-disant cachées et à tir indirect, que nos voisins ont récemment construites en arrière de certaines crêtes de la côte, qui gêneraient beaucoup l’opération. Pendant la nuit, leur action serait nulle.

Toutes les considérations qui précèdent reposent sur l’organisation de la flottille de péniches. Si la guerre éclatait aujourd’hui, il est clair qu’il faudrait rester sur la défensive, jusqu’au moment où cette flottille serait construite. Le temps nécessaire serait d’ailleurs moins considérable qu’on ne le croit, par cette raison, qu’une fois le modèle de la péniche fixé, toutes nos usines situées sur le réseau des canaux pourraient y travailler. Il est probable qu’il serait possible de faire construire, tant en Allemagne qu’en Belgique, une partie des tôles et des différentes pièces nécessaires. On n’aurait qu’à les monter.

Admettons que ce matériel existe, et examinons l’emploi qui peut en être fait.

L’armée de descente pourrait être organisée dans la forme divisionnaire, qui se prête mieux à des opérations de cet ordre. Ce serait d’autant plus facile, que la création récente de nos