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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/433

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qui sont rendus impossibles par la puérile préoccupation gouvernementale de faire des économies sur le budget de la justice. De là, cette réduction étrange du personnel des cours et tribunaux pendant que la tâche du parquet doublait ou triplait ; de là, cet abus de substituer l’information officieuse, comme moins coûteuse, à l’information officielle plus lente, mais plus sûre, aussi longtemps du moins qu’on n’a pas été obligé de la confier, véritable scandale, aux mains inexpérimentées de jeunes juges suppléans. Enfin, il est notoire que le nombre des brigades de gendarmerie est insuffisant, et que ce corps excellent, le meilleur auxiliaire de la justice, est de plus en plus entravé dans l’exercice de ses fonctions essentielles par les corvées administratives ou militaires dont on le surcharge. Le jour où on le voudra fermement, je suis persuadé qu’on remédiera sans peine à la progression des délits impoursuivis. »

Le tableau tracé par M. Tarde met en une éclatante lumière les vices de l’organisation actuelle et leurs causes. Assurément les magistrats de province, ceux des petites villes surtout, manquent d’auxiliaires, les gendarmes n’ayant pas le temps de les seconder en accomplissant cette partie de leurs fonctions, la plus attachante de toutes, et celle qui a leur préférence, ils ne cessent de le proclamer bien haut. Il convient d’ajouter aussi que les malfaiteurs bénéficient de cette très grave erreur qui consiste à déléguer aux délicates fonctions de l’instruction des magistrats qui n’en ont point le goût, et qui les remplissent sans enthousiasme, sans ardeur, et par suite sans profit pour la sécurité publique. Il ne serait peut-être pas excessif de dire : on ne devient pas juge d’instruction, on naît juge d’instruction.

Parlons enfin d’une question qui a selon nous une importance considérable : les recherches dans les prisons. Les télégrammes, commissions rogatoires, mandats d’arrêt prescrivant des recherches sont transmis par les parquets à la gendarmerie et à la police et quelquefois, mais tout à fait exceptionnellement, ils sont communiqués dans les maisons d’arrêt. La communication aux maisons d’arrêt n’a guère lieu que s’il s’agit de représenter la photographie d’un détenu qui refuse de faire connaître son état civil. Or il arrive très fréquemment que police et gendarmerie explorent en vain les villes et les campagnes, par l’excellente raison que le fugitif qui leur est signalé est détenu en quelque maison d’arrêt, le meilleur des abris contre les recherches. S’il s’agit