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l’est plus par le fait et dépend politiquement du Japon ou de la Russie, peu importe pour le moment. Puis vient la presqu’île de Liaô-Toung, aux Russes, avec Port-Arthur qui, avant cinq ans, sera relié à Saint-Pétersbourg par le chemin de fer transsibérien dont un des embranchemens doit s’avancer jusqu’à Vladivostok sur le Pacifique. Par ses traités, ou par le fait, la Russie s’étend maintenant jusqu’à la Grande Muraille, c’est-à-dire à deux journées de marche de Pékin ; une partie de la Mongolie, toute la Mandchourie sont dans sa zone exclusive d’influence ; enfin, par des chemins de fer concédés, les Russes tendent de plus en plus à pénétrer dans la vallée du Yang-tsé, c’est-à-dire aux confins mêmes des prétentions anglaises.

Mais suivons le contour du golfe de Pe-tchi-li dont les rives, coupées par l’embouchure du Peï-ho, sont, pour l’instant, restées intactes entre les mains de la Chine. Voilà du moins la route par mer pour se rendre à Pékin à peu près libre du contrôle étranger, à condition toutefois, pour les navires en destination de Tien-tsin, de saluer, à l’entrée du golfe, les « pavillons amis » de la Russie à Port-Arthur ou de l’Angleterre à Wei-haï-Wei. Cette dernière position stratégique, occupée par la Grande-Bretagne, se détache en pointe sur la province de Chantoung, où les Allemands se sont affermis en prenant possession, il y a quelques mois, de Kiao-Tchéou. Ils proclament aujourd’hui que l’influence germanique doit être prépondérante sur cette côte en réservant à son industrie tous les moyens de pénétration vers l’intérieur, sans d’ailleurs en définir les limites.

Au Sud du Chantoung, s’étale la vallée du Yang-tsé, et la Grande-Bretagne assure que ce fameux Fleuve Bleu doit être sa sphère d’action. La part est belle, à coup sûr, car nulle contrée de la Chine ne semble plus fertile ni plus peuplée ; ce serait Han-Kow, Nankin, Shang-Haï et sans doute toute la côte, depuis les confins du Chantoung, au Nord, jusque vers la latitude de l’île de Formose, définitivement acquise aux Japonais. Ceux-ci revendiquent la côte faisant face à leur île, tandis que les Français se sont attribué les provinces qui, de là, s’étendent jusqu’au Tonkin. On sait que Hong-Kong, avec son territoire agrandi, et Macao, possession portugaise, ferment l’entrée du golfe de Canton, port ouvert au commerce européen. Voilà la côte, toute la côte, dévolue aux plus pressés ; voyons l’hinterland. L’Empire britannique s’y est assuré certains avantages, puisque déjà un plan de voies ferrées ou navigables