Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/717

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

valeur. Ces facultés, chez nous, sont malheureusement inférieures à ce qu’elles sont chez les Anglais. Et nous aurons de plus grands obstacles à vaincre. Il ne suffit pas, en effet, d’avoir des colonies de production : il faut leur assurer des voies d’écoulement et des débouchés. Le Bornou et le Sokoto anglais sont riverains de la Benoué et du Niger, et par conséquent favorisés à ce point de vue. Le Baghirmi, le Ouadaï, le Kanem, le Borkou et le Tibesti français sont en rapport avec le Congo en amont des cataractes et avec le désert du Sahara. C’est pour cela que nous cherchions à nous assurer éventuellement l’accès de la vallée du Nil par le Bahr-el-Ghazal : nous aurions trouvé de ce côté une porte de sortie sur laquelle nous ne pouvons plus compter que dans une mesure incertaine. Nous verrons bientôt que, si elle nous reste entr’ouverte, ce n’est peut-être pas très largement.

Pour épuiser la question territoriale réglée par l’arrangement, il faut dire un mot du Darfour. Le Darfour est situé à l’est du Ouadaï français et à l’ouest du Kordofan anglo-égyptien. C’est une région intermédiaire située entre les bassins du Nil et du lac Tchad, et qui est à cheval sur la ligne de partage des eaux de l’un et de l’autre. Si on consulte les cartes les plus récentes et les plus conformes aux dernières connaissances géographiques, on s’aperçoit qu’il n’y en a pas deux qui se ressemblent complètement, et qui donnent au Darfour las mêmes limites. Toutes néanmoins attribuent à la vallée du Nil la plus grande partie de cette province. Dans l’incertitude où l’on était de savoir exactement où commence et où finit le Darfour, on a procédé comme on le fait toujours en pareil cas : on a décidé qu’une commission mixte, composée de commissaires anglais et français, fixerait définitivement la frontière commune, mais que son tracé ne pourrait, en aucun cas, dépasser, à l’ouest, le 21e degré de longitude est de Greenwich (18°40’ de Paris), ni, à l’est, le 23e degré de longitude est de Greenwich (20°40’ de Paris). C’est donc dans l’espace compris entre deux degrés de longitude que la commission devra opérer. Bien que l’arrangement ne le dise pas, il est à croire que les commissaires recevront pour instructions de rechercher la ligne de partage des eaux entre les deux bassins dont nous avons parlé ; c’est là effectivement le principe général dont paraissent s’être inspirés les négociateurs anglais et français. Lorsque ce travail sera terminé, une ligne conventionnelle s’étendra de la rive droite du M’bomou, rivière qui se jette dans l’Oubangui, jusqu’au 15° de latitude nord : le gouvernement de la République s’engage à n’acquérir ni territoire, ni influence politique à l’est de cette ligne, et le gouvernement anglais à l’ouest. Tel est l’engagement