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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/959

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puissances européennes ont dès maintenant jeté leur dévolu sur tel ou tel point du littoral chinois. Au nord du Yang-tsé-kiang, on trouve les Allemands dans le Chantoung ; au nord du Chantoung, on trouve derechef les Anglais à Weï-haï-weï ; et plus au nord encore les Russes. On n’aperçoit guère aucun point de la côte qui reste disponible, en dehors du golfe de Petcliili. Les Italiens ont bien fait de se presser s’ils veulent fonder un établissement en Extrême-Orient ; il leur a même fallu quelque ingéniosité pour découvrir la baie de Sam-moun, et on ne voit pas où ils auraient pu se loger ailleurs. Leur ministre à Pékin, M. di Martino, a donc été chargé de demander au Tsong-li-yamen, d’abord la baie, puis un territoire suffisant pour y établir un dépôt de charbon et y assurer un point d’appui à la flotte ; en troisième lieu, des droits de préférence pour la construction des chemins de fer et l’exploitation des mines ; enfin la concession d’une voie ferrée de 600 kilomètres, allant de la mer au lac Po-yang.

L’Italie ne s’était pas engagée dans une pareille affaire sans s’être entendue avec l’Angleterre et le Japon, destinés, comme nous l’avons vu, à devenir ses voisins immédiats, ni sans avoir pressenti les autres puissances qu’elle a trouvées favorables. On a cru d’abord que la Chine, habituée aux sacrifices, ne ferait pas beaucoup de résistance et qu’elle céderait une fois de plus ; mais on s’est trompé. Loin de se prêter aux désirs qui lui étaient exprimés, le Tsong-li-yamen a refusé d’en admettre le principe et d’en discuter la réalisation ; il a renvoyé purement et simplement à M. di Martino la note qu’il avait reçue de lui. Un pareil procédé était incorrect et blessant. Le gouvernement italien a fait ce que tout autre aurait fait à sa place ; il a protesté et demandé des explications. Le Tsong-li-yamen a répondu qu’il n’avait pas eu l’intention de donner à son refus d’entrer en pourparlers une forme désobligeante, et que, si celle qu’il avait employée avait paru avoir ce caractère, il en faisait ses excuses au gouvernement italien. C’était, assurait-il, dans l’intérêt des bons rapports entre les deux pays, et de leur maintien, qu’il jugeait préférable de ne pas entamer de négociation. On n’a pas pu obtenir de lui d’autre réponse. Alors s’est passé un fait qui est resté jusqu’ici assez mal expliqué : M. di Martino a renvoyé sa note au Tsong-li-yamen en lui donnant quatre jours pour répondre. Cela ressemblait beaucoup à un ultimatum. En agissant de la sorte, M. di Martino obéissait aux instructions générales, mais déjà anciennes, que lui avait données son gouvernement : depuis, il en avait reçu, ou il aurait dû en avoir reçu d’autres ; mais peut-être n’étaient-elles pas arrivées en temps opportun. Quoi qu’il en soit,