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Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 160.djvu/389

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PATRIOTISME ET HUMANITARISME
ESSAI D’HISTOIRE CONTEMPORAINE

AVANT 1870

Il est des maladies qui sont des guérisons. L’organisme s’abandonnait à une certaine mollesse de défensive, et prêtait aux microbes ennemis une indolente hospitalité : un incident survient, qui révèle le mal et brusque l’examen de conscience du patient ; alors l’être humain se ressaisit, coalise ses énergies vitales, les arme pour la lutte, et l’instant même où il se sent tout proche d’être terrassé est celui où il donne le branle à son élasticité victorieuse. Ainsi en advient-il, parfois, pour ces personnes collectives qu’on nomme les nations. On peut leur recommander, à elles aussi, le « bon usage des maladies, » et les consoler de ces maladies mêmes par le réconfortant espoir du profit qu’elles en peuvent tirer.

La France contemporaine traverse une de ces heures de crise. Elle avait pris la douce et morbide habitude de se laisser bercer par la caresse des souffles du dehors ; ses oreilles, déchirées naguère par le bruit des canons prussiens, avaient trouvé du charme au murmure de certains flatteurs exotiques.

Ils lui disaient, ces flatteurs, qu’elle était une France toute nouvelle, républicaine, démocratique : qu’avait-elle besoin, dès lors, de plagier l’ancienne, celle des rois et des tyrans, et d’évoquer perpétuellement, avec une routinière amertume, les tristesses et les malheurs dont s’était clôturée l’histoire de ses