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Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 160.djvu/878

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A TRIANON

Il bruinait quelque peu lorsqu’une voiture de louage s’arrêta devant les Trianons. Un homme d’une quarantaine d’années, de tournure militaire, et dont la figure assez belle était en ce moment rembrunie par une expression de mauvaise humeur, en descendit.

— Et voilà que la pluie s’en mêle ! grommela-t-il entre ses dents. Quelle idée absurde j’ai eue là ! Non, c’est à n’y pas croire !

Il consulta sa montre.

— Pour m’achever, j’ai mal calculé le temps. Une demi-heure à faire le pied de grue ! Imbécile !

Celui qui s’apostrophait énergiquement ainsi jeta un coup d’œil sur les avenues qui vont rejoindre le bassin d’Apollon ; et, l’humidité y aidant, elles ne l’invitèrent pas à la promenade, si belles qu’elles fussent encore, en ces premiers jours de novembre, de la plus pénétrante, de la plus pathétique de toutes les beautés, celle que la mort menace, qui n’a plus qu’un instant, et qui en cet instant rapide se prodigue tout entière. Il n’y avait pas eu de chaleurs desséchantes cette année-là, et l’admirable parc de Versailles roulait, pour quelques jours encore, à perte de vue, une houle de feuillages diaprés.

— Monsieur désire visiter ? demanda un gardien.

M. de Bresle faillit répondre qu’il connaissait l’endroit assez bien et d’assez longue date pour pouvoir lui-même y servir de guide, mais, se ravisant, il saisit l’occasion de se mettre à l’abri.

— Soit, visitons. Rien que les petits appartemens de la Reine, s’il vous plaît. J’ai horreur de votre grand Trianon gâté par Louis-Philippe.

Le gardien le toisa avec autant d’indignation que s’il eût insulté une monarchie régnante, car vous ne verrez aucun gardien