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nous appelons encore l’attention sur les mots « Jehanne la Pucelle » de la main de Jean Rogier.

Douze jours seulement s’étaient écoulés depuis que Jehanne avait écrit aux habitans de Reims, et de nouveau elle leur envoie une longue lettre de bonne amitié. Elle sait qu’il y a un parti bourguignon qui veut livrer la ville ; aussi cherche-t-elle à confirmer leur fidélité. L’âme de cette conjuration était un certain Labbé, membre du Chapitre, dont les projets furent heureusement déjoués. Pour montrer que le Roi aura les troupes nécessaires, elle leur dit que toute la Bretagne est française et que le Duc doit envoyer au Roi trois mille combattans payés pour deux mois.

La signature de cette lettre confirme les précédentes observations. Les caractères très fermes, bien reliés ensemble, indiquent que Jehanne les trace facilement, d’une main tantôt plus ferme comme à celle-ci, tantôt plus faible comme à celle du 16 mars, ce qui indique une personne écrivant couramment.


II. — LES PREUVES

Cette question de la signature avait tellement éveillé mon attention que je peux dire avoir, en toute occasion et pendant plus de quarante ans, cherché à l’éclaircir sur le document humain. L’homme ne change pas, et Jehanne n’a pas eu plus de difficulté pour apprendre à écrire que les illettrés de nos jours. C’est donc avec curiosité que j’ai toujours suivi l’évolution, aussi bien de l’enfant qui commence à écrire, que de l’homme fait qui s’applique à mettre sa signature. Nombre de fois, j’ai vu de braves gens, complètement illettrés, devenir conseillers municipaux et mettre alors leur amour-propre à ne pas être, au moins à cet égard, au-dessous de leurs collègues. Très promptement, ils apprenaient à signer et jamais je n’ai vu