Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/909

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

O vous qui déchirez partout de la musique
Et faites un concert de votre désaccord,
Je veux jeter ma voix dans votre bruit magique,
Ainsi qu’un sou dans un trésor !

J’entends partout un bruit de chute, je regarde,
Je cherche quel palais laisse crouler son mur,
Mais j’ai beau te scruter, tu n’as pas de lézarde,
O voûte immense de l’azur !

J’ai trop peu de mes yeux pour voir tout ce qui bouge,
Que tout, comme une mer, est tumulte et fraîcheur,
Et qu’une vigne vierge est là-bas chaude et rouge
Comme la voile d’un pêcheur.

Là-bas, l’air étincelle et souligne une ville.
Le pays éclatant perd ses derniers rideaux,
Et l’on voit, supposant au vent qui les effile,
Les petits faucons féodaux.

Avec le même orgueil tout se révèle et, fière,
Ainsi qu’une Vertu siège chaque cité.
Courage, dit Pérouse inquiète et guerrière ;
Assise chante : O Pauvreté !

Et les petits hameaux que jamais on ne nomme
Et qui n’ont pas produit de héros ni de saints,
Humbles, ne sachant pas comment on fait un homme,
Montrent seulement leurs raisins.

O vents, courez partout et sonnez chaque cloche,
Mêlez à votre émeute un fabuleux espoir,
Vous annoncez l’hiver et, tandis qu’il approche,
Vous vous retournez pour le voir.

C’est l’hiver âpre et gai, c’est le vieillard alerte,
C’est l’artiste au goût fier qui figera les eaux
Et creuse d’un trait noir dans la lumière ouverte
Les arbres comme des rinceaux.